GABRIEL TARDE ET LA SOCIÉTÉ PARISIENNE À LA FIN DU XIXE SIÈCLE : « RAPIDES MOME
GABRIEL TARDE ET LA SOCIÉTÉ PARISIENNE À LA FIN DU XIXE SIÈCLE : « RAPIDES MOMENTS DE VIE SOCIALE », 1894-1897 Louise Salmon Éditions Sciences Humaines | « Revue d'Histoire des Sciences Humaines » 2005/2 no 13 | pages 127 à 140 ISSN 1622-468X ISBN 2912601315 DOI 10.3917/rhsh.013.0127 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- https://www.cairn.info/revue-histoire-des-sciences-humaines-2005-2-page-127.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Éditions Sciences Humaines. © Éditions Sciences Humaines. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) © Éditions Sciences Humaines | Téléchargé le 24/11/2021 sur www.cairn.info (IP: 177.32.76.233) © Éditions Sciences Humaines | Téléchargé le 24/11/2021 sur www.cairn.info (IP: 177.32.76.233) Revue d'Histoire des Sciences Humaines, 2005, 13, 127-140. Gabriel Tarde et la société parisienne à la fin du XIXe siècle : « rapides moments de vie sociale », 1894-1897 Louise SALMON Résumé Au travers de l’écriture de son journal quotidien, Gabriel Tarde nous renvoie un regard neuf mais aussi aiguisé sur la société parisienne de la fin du XIXe siècle. Il témoigne de la vie professionnelle, culturelle, sociale et mondaine d’un petit magistrat de province muté à Paris au Ministère de la Justice entre 1894 et 1897. 1894 est une année charnière dans la carrière de Gabriel Tarde : elle renouvelle son travail du juge d’instruction de Sarlat au moyen de nouveaux matériaux d’études que sont les statistiques judiciaires ; elle le lance au cœur des réseaux de sociabilité de la capitale où Tarde côtoie alors les grands hommes de pensée de son temps et s’y inscrit comme une personnalité reconnue ; elle l’affirme et le confirme aux yeux d’un nouveau public comme un professeur et un conférencier parisien de renom ; enfin, elle révèle et énonce surtout la perception tardienne du social dont le terrain d’analyse sociologique est cette société parisienne au sein de laquelle il se meut, soit Gabriel Tarde comme un observateur du social. Mots-clés : Juriste – Sociologue – Philosophe – Réseaux – Écriture – Société – Observateur du social – Interpsychologie – Paris – Province. Abstract : Gabriel Tarde and the Paris society at the End of the XIX Century : « Some Moments of Social life » In his diary, GT gives us a fresh and sharp view of the Parisian society of the late 19th century. He describes the professional, cultural, as well as society life of a lower provincial magistrate appointed to the Ministry of Justice in Paris , from 1894 to 1897. 1894 is a crucial year in Tarde's career for different reasons. First, with criminal statistics, the examining judge from Sarlat discovers a new method of investigation. Second, he his launched within the Parisian high society, where he meets the great thinkers of the time, and is himself accepted as a succesful professor and speaker. Finally, he reveals himself as a social scientist whose object is precisely this Parisian society. Key-Words : Lawyer – Sociologist – Philosopher – Networks – Writing – Society – Social Scientist – Inter-Psychology – Paris – Province. © Éditions Sciences Humaines | Téléchargé le 24/11/2021 sur www.cairn.info (IP: 177.32.76.233) © Éditions Sciences Humaines | Téléchargé le 24/11/2021 sur www.cairn.info (IP: 177.32.76.233) Revue d'Histoire des Sciences Humaines 128 « Ah ! Ah ! Ah ! Ah ! Ah ! Ah ! Ah ! Pauvre Tarde, hélas ! Qu'allais-tu faire au ministère ? Ah ! Ah ! Ah ! Ah ! Ah ! Ah ! Ah ! Pauvre Tarde, hélas ! Que d'ennuis t'attendent là-bas ! 1. Toi qui d'humeur incertaine Flânais tout le long du jour Te voilà dans un séjour Où chacun est à la chaîne ! (…) 3. Aujourd'hui les statistiques – Ce mot seul me ferait fuir – Te changeant en rond de cuir Te font remplir leurs fuir – Te changeant en rond de cuir Te font remplir leurs rubriques (…) 4. À Sarlat, dans chaque chambre Sur table, canapé, lit, Traînaient des livres qu'on lit De Janvier jusqu'en Décembre 5. À Paris, en toutes places ; Bureaux, sols, chaises, parois, S'étalent recueils de lois, Cartons verts et paperasses » 1. Lorsque Gabriel Tarde est nommé au ministère de la Justice à Paris en janvier 1894, sa réputation est déjà faite ; il est un auteur reconnu ayant déjà formulé l'essentiel de son système de pensée 2. « Quand Tarde a quitté Sarlat, en 1894, à 51 ans, sa formation intellectuelle et scientifique était achevée. Toutes ses idées, toutes ses doctrines étaient fixées et, pour la plupart, avaient été déjà très nettement exprimées. Il venait à Paris à l'époque de la « moisson ». (…) Sans doute, Paris lui a permis de s'épanouir avec éclat. Paris seul pouvait le mettre en plein relief et lui donner toute sa valeur sociale » 3. Mais c'est en tant que magistrat qu'il est promu chef du Bureau de la statistique après avoir remis à la demande du Garde des Sceaux, Antonin Dubost, un mémoire sur l'organisation de la statistique criminelle en France. Cette nomination marque un réel tournant dans la carrière de Gabriel Tarde : « M. Antonin Dubost, alors ministre de la Justice, que je ne connaissais pas, mais qui avait entendu parler de moi, m'offrit spontanément de me nommer chef de bureau de la statistique judiciaire à son ministère. Cela se passait en janvier 1894. J'acceptais et je fis bien » 4. Il quitte sa ville natale de Sarlat où il a exercé, sur les traces de son père, la fonction de juge d'instruction depuis novembre 1875 et où plus rien ne le retient car sa mère est décédée en novembre 1891 5. De Paris, il résume ses années de service à l'exercice des fonctions de « juge suppléant au tribunal civil de Sarlat (Dordogne) de septembre 1869 à octobre 1873 ; substitut du Procureur de la République à Ruffec (Charente) d'octobre 1873 à novembre 1875 ; juge d'instruction à Sarlat (Dordogne) et depuis janvier 1894, chef du bureau de la statistique et des casiers judiciaires au ministère de la Justice » 6. 1 Lettre de J. Delbœuf à Tarde, février-octobre 1894. Publiée in CARROY, CASTEL, 1997, 112. 2 Nous nous permettons de renvoyer à notre article sur les archives de Gabriel Tarde, SALMON, 2005. 3 Fernand Faure, professeur à la Faculté de Droit de l'université de Paris, directeur de la Revue Politique et Parlementaire, secrétaire général du Comité parisien du Monument Tarde, in DISCOURS DE SARLAT, 1909. Charles Benoist confirme ce point de vue : « Il arrivait donc à Paris, précédé de son œuvre ébauchée et de sa réputation commençante. On savait déjà de lui ce qu'il suffit de savoir du sage : que jusqu'alors il avait caché sa vie, et que, s'il n'avait pas encore répandu son esprit, il y avait en lui un esprit qui voulait se répandre ». Émile Levasseur l'atteste aussi : « Sa réputation l'avait précédé à Paris. Les lois de l'imitation étaient dans toutes les mains alors que bien peu d'entre nous connaissaient l'auteur (…) la largeur de ses perspectives et le charme tout personnel qui répondaient bien à la spontanéité des idées de ce penseur, qui s'étaient formé lui-même par ses méditations solitaires », in DISCOURS DE SARLAT, 1909. 4 Revue Universelle, 1904, 112. Nécrologie. Reproduction des passages de la lettre (29 janvier 1904) de Tarde adressée au collaborateur de la revue, G.L. Duprat. 5 « Gabriel Tarde, après une carrière silencieusement faite parmi vous, arrivait à peine dans ce Paris qu'il devait conquérir si vite. La main maternelle, dans laquelle sa main était restée, pendant un demi-siècle, doucement emprisonnée, avait, hélas ! fini par s'ouvrir, et il s'était pour la première fois senti libre, ayant laissé son cœur dans ce coin de terre, d'aller promener son regard curieux de tout et sa pensée insatiable ». Charles Benoist, membre de l'Institut, député de Paris, professeur à l'École Libre des Sciences politiques, in DISCOURS DE SARLAT, 1909. 6 Résumé des services de Tarde dans une lettre datée du 6 août 1895. Archives Nationales, CARAN, Dossier de légion d'honneur de Gabriel Tarde, Cote : L256814 11f. « Vous vous étonnerez peut-être, me dit-il, de mon © Éditions Sciences Humaines | Téléchargé le 24/11/2021 sur www.cairn.info (IP: 177.32.76.233) © Éditions Sciences Humaines | Téléchargé le 24/11/2021 sur www.cairn.info (IP: 177.32.76.233) Louise Salmon 129 Gabriel Tarde reprend alors l'écriture de son journal interrompue depuis dix-huit ans. Entre 1894 et 1897, il y décrit une réalité nouvelle à ses yeux au travers des lieux, des milieux et des rencontres qui jalonnent sa nouvelle vie parisienne. L'année uploads/Litterature/ gabriel-tarde-et-la-societe-parisienne-a-la-fin-du-xixe-siecle-1894-1897-louise-salmon.pdf
Documents similaires










-
45
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Jul 27, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
- Taille du fichier 0.5308MB