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m Ë ^.r-JîK' ,/: ^^ K %^-«s "' ^>#- r*"Pt ésoBSB^Jssieia ex: libris PAUL-EMILE DUMONT ESQUISSE D'UNE HISTOIRE DE LA PHILOSOPHIE INDIENNE PAR Paul Masson-Oursel AGRÉGÉ DE L' UNIVERSITÉ CHARGÉ DE SUPPLÉANCE A LA FACULTÉ DES LETTRES ET A l'École des hautes études religieuses ^- Librairie Orientaliste PAUL GEUTHNER 13, rue Jacob, Paris VI^ 1923 THÈSE PRÉSENTÉE A LA FACULTÉ DES LETTRES DE l'université DE PA.RIS B A MES MAITRES MM. Sylvain Lévi et A. FOUCHER Hommage de reconnaissante affection. PREFACE Prétendre écrire, au sens exact du terme, une histoire de la philosophie indienne, attesterait, quant à présent, une ambition téméraire. Non seulement des domaines entiers de la civilisation de l'Inde, qui produisirent d'im- menses littératures, se trouvent, aujourd'hui encore, soit inexplorés, soit insuffisamment défrichés par la critique du philologue ou de l'historien, mais on peut à bon droit se demander s'il sera jamais possible de fixer assez de jalons chronologiques pour qu'en cette matière le récit mérite le nom d'histoire : il y aurait quelque optimisme à supposer qu'une documentation extra-indologique, ardue à acquérir, par exemple tibétaine, chinoise, persane, autre encore, suppléera tôt ou tard à l'indigence des renseignements datés que fournissent les matériaux hindous. Peut-être, toutefois, l'état actuel de nos connaissances permet-il une vue d'ensemble sur l'évolution de la pensée indienne, un aperçu qui situerait à leur place, et dans leur signification approximative, des faits qui, pour être d'ordre intellectuel ou spirituel, ne comportent pas moins une étude positive. Notre prétention n'ira pas au delà : nous nous garderons soit de masquer l'ampleur de notre ignorance, soifc de dis- simuler le caractère conjectural d'un grand nombre de nos interprétations. Ni par sa documentation, ni par ses conclusions, le présent travail ne saurait apparaître comme un ouvrage original d'indianisme. Nous espérons cependant qu'il ne sera pas indifférent aux spécialistes d'assister à une tenta- 6 HISTOIRE DE LA PHILOSOPHIE INDIENNE tive d'exposer dans son entier, quoique de façon très som- maire, un sujet qui ne fut jamais traité que partiellement; l'essai, si provisoire soit-il, de déterminer, sans forcer les données de fait, ce que nous appellerions volontiers, avec Cournot, «l'enchaînement fondamental» des idées sur les- quelles a vécu l'Inde spéculative, doit autoriser certains jugements qui, bien qu'inspirés par la synthèse plus que par l'analyse, peuvent offrir une relative objectivité. La nature de notre tâche nous contraindra souvent à ne faire que chercher des solutions moyennes entre des hypothèses opposées, ou même à résumer simplement l'opinion d' autrui; mais elle suscitera quelquefois devant nous des problèmes rarement formulés en termes précis, voire insoupçonnés; elle nous imposera, en mainte occasion, un point de vue propre sur des questions déjà débattues. Au surplus, cet ouvrage doit être lisible, par delà le cercle des indianistes, pour quiconque s'intéresse à l'histoire des diverses civili- sations et, en particulier, à l'histoire de la philosophie. Tel est le motif qui nous a persuadé de composer cette Esquisse en partie double: le texte devant être intelligible aux pro- fanes, il nous a paru nécessaire de rejeter dans des annota- tions les références critiques et maints détails qui eussent surchargé l'exposé ou intercepté les grandes perspectives du sujet. Notre but essentiel serait. atteint, si certains des plus précieux résultats de Findologie devenant ainsi accessibles à chacun, cette pensée indienne qui se développa en parfait synchronisme avec la pensée européenne obtenait enfin, à l'égal de la réflexion grecque et de tout ce qui en est issu, droit de cité parmi cet ensemble de connaissances et d'as^ pirations qui importent grandement à l'humanisme, et que nous appelons philosophie. I1NTRODUCTION L'objet et la méthode de l'histoire de la philosophie ne sauraient être tout à fait les mêmes en ce qui concerne l'Inde qu'en ce qui touche l'Europe. Donner au lecteur con- science de cette différence de conditions, c'est l'initier à ce minimum d'information indologique sans la possession duquel la pensée de l'Inde risquerait de demeurer lettre morte. Bien qu'il ait paru dans le monde indien mainte doctrine aussi exempte de toute connexion avec une religion que peut l'être la science moderne, ou encore le positivisme, opinions philosophiques et croyances religieuses se séparent plus malaisément dans l'Inde qu'en Europe. Non pas que la complète liberté de pensée ait été plus exceptionnelle là-bas que chez nous : il nous sera loisible, au contraire, de constater que l'évolution y a consisté en une série de vicissitudes qui firent alterner religions et philosophies, un dogme antérieur se muant en doctrine réfiexive, un système abstrait donnant naissance à une église par suite de la discipline qu'il impose, par exemple, à ses adeptes, ou prescrivant, comme propé- deutique à la conquête du vrai, l'exercice de cultes effectifs. Mais le problème capital, nous dirions presque le problème unique auquel s'attaque la pensée libre est là-bas le même qu'aborde la pensée religieuse: celui du salut, ou, plus exac- tement, de la délivrance. On chercherait donc en vain à com- prendre la portée d'un effort pourtant tout philosophique, autrement qu'en fonction des croyances antérieures ou am- biantes. Dans ces conditions, quoique notre dessein nous 8 HISTOIRE DE LA PHILOSOPHIE INDIENNE dispense d'une étude spéciale des multiples religions qu'a pratiquées l'Inde, nous ne saurions éluder l'obligation d'examiner, au moins quant à la portée spéculative de leurs mythes ou de leurs dogmes, les principaux de ces cultes. En raison même de ses attaches étroites avec la vie religieuse, la philosophie indienne se présente sous un aspect différent de la philosophie européenne. L'autorité d'une tradition y passe pour garantie de la vérité; de sorte que la pensée se manifeste moins comme une réflexion indivi- duelle, dont son auteur s'attribuerait le mérite, que comme la réflexion de diverses lignées de sages, dont chacun prise, non sa modeste contribution personnelle, mais, au contraire, la doctrine commune à tous les zélateurs de la secte. Les doctrines revêtent de la sorte un caractère impersonnel sur lequel ne saurait faire illusion le nom de l'auteur, le plus souvent mythique, à qui elles sont attribuées. Tantôt le maître sous l'invocation duquel se trouvent placées ces doctrines, appartient à un âge très reculé, antérieur aux époques historiques ; tantôt il est conçu comme un héros supérieur à l'humanité; l'attribution offre ainsi le même degré d'authenticité que l'imputation à Orphée des textes «orphiques»: le nom du vieux sage ou du demi-dieu ne désigne que la tradition d'une communauté ou d'une école. Alors même que l'auteur est un personnage historique sa figure s'entoure de légende à proportion de la vénération qu'elle inspire: les détails biographiques dont l'écho nous parvient, reflètent la notion que se firent du maître des disciples souvent lointains, plutôt que des circonstances de fait. Il ne saurait donc y avoir lieu que très rarement d'expli- quer la genèse d'un sj^stème par la psychologie d'un penseur. La philosophie de l'Inde étant collective plutôt qu'in- dividuelle, les attitudes spéculatives persistent aussi long- temps qu'elles comptent des adeptes, ainsi qu'il arrive dans INTRODUCTION le cas des religions. Les systèmes ne se succèdent donc pas les uns aux autres: au contraire, ils tendent à se par- achever chacun quant à soi, voire même à se compléter par des participations à des doctrines rivales. Leur émulation semble perpétuelle: elle suscite de leur part soit une rigueur croissante, soit un éclectisme grandissant; mais elle les main- tient tous plutôt qu'elle n'exclut et n'élimine certains d'entre eux. Parmi ce chaos de facteurs disparates, qui compose la société indienne, rien ne meurt, et jamais non plus, semble- t-il, rien ne commence: les plus archaïques croyances con- servent des adhérents, et la plus ancienne mention connue d'une opinion paraît supposer un long développement pré- cédent. La détermination de repères chronologiques n'en est que plus épineuse; et, lors même qu'elle se justifie en fait, on ne saurait trop se tenir en garde contre la tentation de faire commencer aux alentours d'une date une attitude spirituelle qui peut remonter à un passé beaucoup plus haut. Rien ne serait donc plus faux que de concevoir la philosophie indienne à l'image de l'européenne, comme une série de systèmes qui se succèdent parce qu'ils se supplantent: la prédilection pour une vérité de caractère traditionnel, l'aversion pour toute empreinte d'individualité, la répu- gnance à l'égard du changement, s'opposent point par point à notre méfiance de l'autorité, à notre foi en la puissance d'intuitions individuelles, à notre obsession de l'évolution qui nous fait postuler par principe, en tout ordre, une modi- fication constante des faits ou une graduelle transformxation des idées. Ce contraste entre deux mentalités, qui frappe tout Oriental venant dans l'Occident, ainsi que tout Occidental parcourant l'Asie, doit être admis comme fait, mais il y aurait danger à s'en autoriser pour préconiser l'exclusive légitimité méthodologique soit de l'une, soit de l'autre 10 HISTOIRE DE LA PHILOSOPHIE INDIENNE attitude. Soutenir, comme la plupart des Hindous restés étrangers à la science européenne, que les divers aspects de la pensée indienne ont pour âge véritable, pour signification authentique l'âge, le sens que la tradition leur attribue, c'est, par préjugé, faire bon marché de l'histoire, mais c'est quelquefois l'indice d'une compréhension profonde, et même d'un sens historique plus uploads/Litterature/ esquisse-d-x27-une-histoire-de-la-philosophie-indienne-1923.pdf
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- Publié le Fev 27, 2022
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