Carla Cariboni Killander, SOL, FRAA01 VT 2013 1 Éléments pour l’analyse du roma

Carla Cariboni Killander, SOL, FRAA01 VT 2013 1 Éléments pour l’analyse du roman Sources : Reuter, Yves, Introduction à l’analyse du roman, Dunod, 1996 Jouve, Vincent, La poétique du roman, SEDES, 1997 Gérard Genette, Figures III, Seuil, 1972 Ce document vous présente quelques notions centrales pour l’analyse du texte littéraire. Lisez-le et essayez surtout de comprendre, sans vous préoccuper à ce stade de mémoriser tous les termes techniques qui y figurent. Texte Le texte, du latin textus (tissu), est un ensemble de mots corrélés entre eux afin de constituer une unité logique-conceptuelle. Un texte se différencie par rapport à un ensemble de mots juxtaposés au hasard grâce à la présence d’une finalité communicative. Un texte peut être bref (Giuseppe Ungaretti, poète italien du XXe siècle a écrit un poème intitulé Mattina, qui se compose de deux vers: M’illumino /d’immenso. Le roman Le Père Goriot est un texte long). Les textes se différencient non seulement par leur longueur, mais aussi par les différents buts qu’ils se donnent. Voici une typologie de base des textes: - texte descriptif: il contient la description d’un objet, d’un lieu, d’un personne. La description peut être objective, lorsqu’elle est conduite de manière détachée et se donne le but principal de reproduire l’objet tel qu’il est ou tel qu’il apparaît (descriptions de bâtiments, de lieux, de monuments telles qu’on les trouve dans les guides touristiques). Elle peut être subjective, lorsque la participation émotive de l’auteur détermine le choix des mots utilisés pour décrire (par ex la description d’une personne aimée, dans un roman d’amour). - texte informatif: a le but d’informer à travers une explication. Ex: chroniques journalistiques ou historiques, relations de voyage ou d’expériences scientifiques; biographies; manuels scolaires; entrées des encyclopédies; guides touristiques. - texte normatif : a le but de guider le comportement du destinataire du message à travers des obligations, des interdictions, des conseils. Ex: les instructions pour le fonctionnement d’un appareil électroménager; les règles des jeux; les règles à respecter dans différentes situations sociales (école, piscine, bibliothèque...); les instructions pour remplir des formulaires; les instructions pour l’emploi d’un médicament; les instructions de l’enseignant en vue d’un exercice. - texte argumentatif : le destinateur d’un texte argumentatif a pour but de persuader le destinataire, en démontrant ce qu’il affirme à l’aide de preuves convaincantes. - texte narratif: a le but de raconter une histoire, c’est-à-dire une série d’événements liés entre eux et centrés sur un ou plusieurs personnages. Le texte narratif est appelé littéraire s’il raconte une histoire qui est le fruit d’une invention, mais qui est présentée et acceptée par le lecteur comme si elle s’était véritablement produite. Dans une telle histoire, il n’y a pas que les événements qui soient importants, mais aussi la forme à travers laquelle ils sont racontés. Carla Cariboni Killander, SOL, FRAA01 VT 2013 2 Cette union d’un contenu et d’une forme est source de plaisir pour celui qui lit ou qui écoute. La narration est donc un acte communicatif ayant pour objet la représentation d’événements réels ou imaginaires qui se déroulent le long d’un axe temporel à travers un ensemble de situations liées entre elles par des rapports de cause et effet. Le but profond d’un texte littéraire est de proposer un discours général sur l’existence. Dans la suite de ce document, nous sous intéresserons au texte littéraire. Paratexte Par le mot paratexte on entend tout ce qui entoure le texte sans être le texte proprement dit (par ex. le titre, la préface, la table des matières, la postface). Le paratexte est le lieu où se noue le contrat de lecture entre auteur et lecteur. Le contrat de lecture indique au lecteur un horizon d’attente, c’est-à-dire un champ de possibles qui se dessinent pour le lecteur avant qu’il ait commencé sa lecture. Le titre Il y a plusieurs types de titres : On distingue : - le titre thématique : évoque le thème de l’ouvrage, ce dont on parle. Il peut être littéral (Les Liaisons dangereuses, par de Laclos, qui renvoie au sujet central), métonymique (Le Père Goriot, par Balzac, qui renvoie à un personnage secondaire de l’histoire), métaphorique (Voyage au Bout de la Nuit, par Céline, qui décrit le contenu du texte de façon symbolique), antiphrastique (La Joie de Vivre, par Zola, qui présente ironiquement le contenu du roman, où le protagoniste est obsédé par la mort). - le titre rhématique : désigne la forme (par ex. Le Roman comique, qui désigne un trait formel : l’appartenance à un genre) La préface La préface est normalement écrite par l’auteur au moment de la première parution du livre (préface auctoriale originale). Elle a deux fonctions principales : - L’incitation à la lecture : Pourquoi lire? la préface insiste sur l’importance de la question traitée et sur l’utilité (documentaire, intellectuelle, morale, religieuse, politique ou sociale) qu’il y a à lire l’ouvrage ; la préface souligne (selon les goûts supposés du public auquel le texte s’adresse) l’originalité de l’œuvre, son respect de la tradition ou sa véridicité. - La programmation de la lecture : Comment lire? la préface donne toute sorte d’information qui peut orienter la réception du roman, guider le lecteur dans sa relation au texte (informations sur l’élaboration de l’œuvre, commentaire du titre, déclarations d’intention etc.) Carla Cariboni Killander, SOL, FRAA01 VT 2013 3 La préface peut aussi être ultérieure (écrite par exemple pour répondre aux critiques), allographe (écrite par un tiers), fictionnelle (elle peut par exemple attribuer le texte à un auteur fictif). Incipit L’incipit (= les premières lignes d’un texte) remplit trois fonctions : - 1. nouer le contrat de lecture. L’incipit indique la position de lecture à adopter pour le lecteur, en donnant souvent des indications génériques (à quel genre appartient le texte). Exemples : « Jinn et Phyllis passaient des vacances merveilleuses, dans l’espace, le plus loin possible des astres habités » annonce un roman de type fantastique (La Planète des Singes, Pierre Boulle) « Dans les premiers jours de l’an VIII, au commencement du vendémiaire ….», annonce un roman historique, sur la Révolution française (Les Chouans, Balzac) L’incipit du roman réaliste se caractérise, en général, par la référence à une date et des lieux précis, pour que le lecteur reconnaisse dans le texte ce qui existe hors du texte. L’auteur veut faire oublier le caractère fictif du roman, donner l’illusion que l’histoire racontée se confond avec le monde réel. Il utilise souvent le procédé du début in media res (expression latine qui signifie « au milieu des choses », c’est-à-dire que le récit commence au cœur de l’action), très efficace pour authentifier la fiction. Exemple : l’incipit des Noces Barbares, par Yann Queffélec : « Le bain refroidissait. Nicole émergea… » - 2. informer : l’incipit répond aux trois questions : qui ? où ? quand ? Le début du roman renseigne le lecteur sur : les personnages principaux, le lieu, l’époque de l’action. - 3. intéresser : l’incipit suscite la curiosité du lecteur (en créant une atmosphère, en annonçant une thématique) Énoncé et énonciation Tout fait linguistique peut s’analyser soit comme énoncé, soit comme énonciation. L’énoncé est le produit fini et clos à objet d’étude de la narratologie L’énonciation est l’acte de communication qui a généré l’énoncé (qui? quel temps ? quel lieu ? quelle intention ?) à objet d’étude de la sociologie, l’histoire, la psychanalyse. Carla Cariboni Killander, SOL, FRAA01 VT 2013 4 Auteur et lecteur ; narrateur et narrataire Une distinction de base pour l’étude de la littérature est celle entre le texte et le hors-texte, ou entre le linguistique et l’extra-linguistique. Il faut donc faire la différence entre : d’un côté l’auteur (qui a existé ou existe, en chair et en os) et le lecteur (l’individu qui tient le livre entre ses mains) qui existent dans le monde réel ; de l’autre, le narrateur et le narrataire, c’est-à-dire les personnes fictives qui semblent communiquer dans le texte et qui existent, elles, dans le monde textuel. Le narrateur est créé par l’auteur, c’est la voix qui raconte l’histoire à l’intérieur du livre. Il n’existe qu’en mots dans le texte. Le narrataire est celui auquel le narrateur s’adresse dans l’univers du récit. Il n’a qu’une existence textuelle, il est construit par le roman. « Narrateur et narrataire peuvent être explicites ou implicites, ils sont en tout cas consubstantiels au texte. » (Reuter, p. 37) Auteur Lecteur Narrateur Narrataire Fiction et référent Il ne faudra pas non plus confondre fiction et référent: Fiction : le monde tel qu’il est représenté par et dans le texte, l’image du monde construite par le texte, qui n’existe que dans et par ses mots. Référent : notre monde empirique, le réel qui existe hors du texte et auquel le texte réfère. « Le mot chien n’aboie pas » (Roland Barthes) Carla Cariboni Killander, SOL, FRAA01 VT 2013 5 Histoire/narration/récit Ces trois termes sont utilisés par le théoricien Gérard Genette pour distinguer trois niveaux d’analyse du texte littéraire. Parfois on utilise d’autres termes pour signifier les mêmes choses ; ils sont donnés entre parenthèses. L’histoire (fiction, uploads/Litterature/ elements-pour-l-analyse-du-roman-pdf.pdf

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