Décadrages 23-24 (2013) Le doublage ...........................................

Décadrages 23-24 (2013) Le doublage ................................................................................................................................................................................................................................................................................................ Alain Boillat et Laure Cordonier La traduction audiovisuelle : contraintes (et) pratiques - Entretien avec Isabelle Audinot et Sylvestre Meininger ................................................................................................................................................................................................................................................................................................ Avertissement Le contenu de ce site relève de la législation française sur la propriété intellectuelle et est la propriété exclusive de l'éditeur. 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Référence électronique Alain Boillat et Laure Cordonier, « La traduction audiovisuelle : contraintes (et) pratiques - Entretien avec Isabelle Audinot et Sylvestre Meininger », Décadrages [En ligne], 23-24 | 2013, mis en ligne le 10 avril 2014, consulté le 16 janvier 2016. URL : http://decadrages.revues.org/695 Éditeur : Association Décadrages http://decadrages.revues.org http://www.revues.org Document accessible en ligne sur : http://decadrages.revues.org/695 Ce document est le fac-similé de l'édition papier. ® Décadrages Entretien Audinot & Meininger 9 La traduction audiovisuelle : contraintes (et) pratiques – Entretien avec Isabelle Audinot et Sylvestre Meininger par Alain Boillat et Laure Cordonier Afin d’en savoir plus sur les conditions pratiques de la traduction audiovisuelle, nous avons réalisé un entretien avec deux professionnels de ce domaine : Isabelle Audinot, traductrice et adaptatrice de l’audiovisuel free-lance de l’anglais et de l’italien vers le français ainsi que Sylvestre Meininger, qui s’est orienté vers cette profession après un doctorat en études cinématographiques1. Ces deux ci- néphiles, engagés dans la défense des intérêts de ce métier en tant que membres actifs de l’Ataa 2, nous expliquent divers aspects de cette pratique peu connue, et rendent compte du contexte actuel de cette profession en France. 1 Dirigée par Noël Burch, la thèse soutenue en 1999 par Meininger porte sur la reconstruction de la masculinité américaine dans le cinéma hollywoodien au cours des années 1980. Parmi ses articles académiques, voir notamment « Corps mortels. L’évolution du personnage de Ripley dans la trilogie Alien », Cinémas, vol. 7, no 1-2, 1996, pp. 121-150 (http://id.erudit.org/ iderudit/1000936ar, consulté le 12 janvier 2013). Un entretien de Meininger par « Ecran noir » sur le sous-titrage et les conditions de travail des traducteurs de l’audiovisuel réalisé en 2003 (au moment où les sous-titreurs de la société SDI Media France ont cessé en bloc de travailler pour cette société) est disponible en ligne : www.ecrannoir.fr/entrevues/entrevue. php?e=79 (consulté le 12 janvier 2013). 2 Association des Traducteurs et Adaptateurs de l’Audiovisuel. Voir www.ataa.fr. Pour des ré- férences à d’autres organisations profession- nelles, voir le blog de l’Université de Nice : http://masterprotsd.wordpress.com. Entretien Audinot & Meininger 9 Dossier : le doublage Comment en êtes-vous venu à exercer le métier de traduc- teur/traductrice pour le cinéma ? I. A. – J’ai commencé à avoir envie de sous-titrer les films lorsque j’étais ado et que j’étais vissée devant « Le cinéma de minuit » de Patrick Brion sur FR3 tous les dimanches soirs. Je trouvais que ce serait génial de passer sa vie à regarder des films. C’est donc le cinéma qui m’a menée à la traduction, non le contraire. Après une maîtrise d’anglais, j’ai suivi le DESS en traduc- tion audiovisuelle à l’Université de Lille III en 1987- 1988 (que je n’ai pas obtenu, comme la majorité des étudiants de cette promotion) – il s’agissait à l’époque de la seule formation en France qui conduisait à ce métier 3. Dès 1988, j’ai travaillé dans un laboratoire de sous-titrage pendant 3 ans, où je m’occupais prin- cipalement de tâches techniques de repérage et de ­ simulation4. A l’époque, la traduction pour le cinéma ne constituait pas à proprement parler un métier : une vingtaine de personnes issues d’horizons divers (traducteurs littéraires, historiens du cinéma,…) se 3 Aujourd’hui, les universités de Lille, Nanterre, Strasbourg et Nice possèdent un département qui prépare spécifiquement à la traduction audio­ visuelle. L’enseignement y est plutôt axé sur le sous-titrage, sauf pour Nice et Lille, où le doublage est également abordé. 4 « Le repéreur, qui travaille à partir d’une copie vidéo (fichier, VHS, DVD) et d’une trans- cription des dialogues, définit à l’image près, sur un logiciel professionnel, le point d’entrée, le point de sortie et donc la durée de chaque sous-titre. De cette durée dépendra la lon- gueur du texte contenu dans le sous-titre. […] Une fois la traduction achevée, le traducteur visionne les sous-titres tels qu’ils apparaîtront à l’écran avec un technicien (le simulateur) ou un autre auteur et, dans la mesure du possible, en présence du commanditaire. Garante d’un résultat professionnel, cette étape est cruciale car la présence d’un œil neuf et extérieur per- met de peaufiner l’adaptation » (Faire adapter une œuvre audiovisuelle. Guide du sous-titrage et du doublage, Paris, Ataa, 2011, p. 11). Dossier : le doublage 10 ­ partageaient ce marché. Ce n’est qu’avec la généralisa- tion de la vidéo et l’apparition des formations univer- sitaires que la donne a changé. S. M. – En ce qui me concerne, ce n’est pas du tout ce que je voulais faire dans la vie. J’ai réalisé une thèse de doctorat sur le cinéma américain des années 1980 et, n’ayant pu continuer dans le cadre de la Faculté, j’ai dû me réorienter. Ma maîtrise de l’anglais et ma familia- rité avec le cinéma populaire m’ont amené, grâce à des rencontres, à la traduction audiovisuelle, mais je n’ai suivi aucune formation spécifique en ce domaine ; ma connaissance de la culture américaine acquise lors de ma formation littéraire m’est par contre utile puisque 95 % des films que je traduis proviennent des USA5. Quel est, en France, le statut des traducteurs et adaptateurs audiovisuels sur le plan juridique ? Quels droits ont-ils sur les œuvres sous-titrées ou doublées ? S. M. – Ils possèdent le statut d’auteur de la traduction tel qu’établi par le Code de la Propriété Intellectuelle. Le caractère artistique du travail de la traduction est donc reconnu. I. A. – Une attestation de traduction de l’œuvre est déposée à la Sacem (Société des Auteurs, Com- positeurs et Editeurs de Musique) pour la fiction, à la SCAM pour le documentaire (Société civile des auteurs multi­ média). Ces sociétés perçoivent une somme à titre d’acquittement des droits d’exécution, de diffusion, et de reproduction des œuvres auprès des diffuseurs, et la reversent aux auteurs en pro- portion du nombre de spectateurs qui ont visionné l’œuvre en question. L’affiliation, a priori étonnante, 5 Thierry Le Nouvel estime la part des traduc- tions réalisées à partir de la langue anglaise à 86 % des 10 000 heures de programmes (ci- nématographiques et télévisuels) doublés en France par an (Thierry Le Nouvel, Le Doublage, Paris, Editions Eyrolles, 2007, p. 8). des traducteurs de l’audiovisuel à une société vouée à faire respecter les droits de compositeurs de musique tient à une tradition qui remonte à l’époque du ci- néma muet : la SACEM se chargeait de la perception de droits liés aux morceaux de musique joués dans les salles. Elle a ensuite élargi son champ d’activité aux tra- ducteurs des intertitres. Dans ses mémoires, Suzanne Chantal, l’une des premières traductrices de sous- titres de France, se souvient que, pour être admise à la SACEM, elle avait dû écrire les paroles d’une chan- son, activité pourtant bien peu liée à la traduction6. Que se passe-t-il si un distributeur décide, par exemple pour la sortie d’une nouvelle version en DVD d’un film, de faire réaliser de nouveaux sous-titres ? S. M. – Dans ce cas, si tout fonctionne normalement, l’auteur de la première traduction est prévenu par la Sacem qu’un auteur a déposé une attestation de nouvelle traduction pour cette même œuvre. La tra- duction rémunérée est alors celle qui est diffusée, la SACEM devant normalement se charger de contrôler quelle version est utilisée à chaque diffusion. Il y a bien sûr parfois des confusions, et les auteurs doivent rester vigilants. Comment la légitimité acquise par les auteurs de traduc- tions audiovisuelles se « traduit »-elle en termes de mention de leur nom au générique des films ? I. A. – Dans les années 1980, l’usage était d’indiquer le nom du traducteur au générique de début, simulta- nément à l’indication du monteur du film. Dans les années 1990, la tendance a consisté à mentionner cet 6 Suzanne Chantal, Le Ciné-monde, Paris, Grasset, 1977, p. 203 (« J’ignorais que les sous-titres sont assimilés aux paroles de chansons et que, comme tels, ils perçoivent des droits d’auteur sur les recettes. Il suffit d’appartenir à la SACEM. […] Je vais passer un examen d’entrée. On m’enferme dans un bureau, avec une enveloppe fermée. J’y trouve le thème sur lequel je dois écrire trois couplets et un refrain : uploads/Litterature/ boillat-alain-et-cordonier-laure-la-traduction-audiovisuelle-contraintes-et-pratiques-entretien-avec-isabelle-audinot-et-sylvestre-meininger-pdf.pdf

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