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Accueil > Atelier atelier Sommaire Nouveautés Index Plan Général En Chantier Le sublime aujourd'hui Le sublime aujourd'hui Jean BESSIÈRE Université Sorbonne Nouvelle-Paris III Cet article est une prépublication. Il doit paraître dans un ouvrage collectif sur le sublime, réalisé sous la direction de Patrick Marot, professeur à l'Université de Toulouse-le-Mirail, et édité par les Presses de l'Université de Toulouse-le- Mirail. LE SUBLIME AUJOURD'HUI : D'UN DISCOURS SUR LE POUVOIR DE L'ART ET DE LA LITTÉRATURE, ET DE SA POSSIBLE RÉÉCRITURE Les références au sublime sont fréquentes dans le discours philosophique et critique tout à fait contemporain. Ces références ne sont pas homogènes. Elles ont cependant des raisons d'être. Celles-ci ne se lisent pas tant dans l'adéquati de ces références à la création artistique et littéraire du XXe siècle que dans la fonction de ces références : le sublime devient un moyen de disposer ou de ne pas disposer un pouvoir de l'œuvre et de reconnaître que celle-ci dispose ou ne dispose pas, par elle-même, sa propre pertinence. Le sublime serait alors cette référence qui permettrait d'interroger le statut de l'art et de la littérature du XXe siècle, suivant des cadres usuels d'interrogation, mais aussi suivant ce que l'art e la littérature instituent symboliquement. La référence au sublime est le moyen de mesurer ce moment instituant et de le caractériser diversement. Il ne s'agit pas ici de valider les caractérisations contemporaines du sublime, ni de les intepréte mais de les réécrire suivant leurs implications et de tenir ces implications pour les moyens de préciser le statut de la littérature au XXe siècle, particulièrement selon son jeu avec le commun et suivant le moment de l'instituant symbolique[1]. Les illustrations de ces discours contemporains sur le sublime qui sont ici retenues font système suivant des jeux d'oppositions internes à ce système. Ces oppositions permettent de marquer les contradictions implicites de la pensée contemporaine du sublime et d'indiquer, par là, au prix d'une réécriture, ce que cette pensée désigne à travers sa référence au sublime. I. DE QUELQUES DISCOURS CONTEMPORAINS SUR LE SUBLIME ET DE LEURS INCONSÉQUENCES Le discours contemporain sur le sublime est un discours qui veut savoir l'incohérence du traité de Longin[2]. Cela dispos la difficulté à traiter de manière cohérente du sublime. Cela autorise les variations sur le sublime, quelle que soit la constance des rappels de Burke, de Kant, de Hegel. Cette difficulté de la cohérence se lit dans les variations de la définition ou de l'identification des pratiques du sublime chez un même auteur. Ainsi Jean-François Lyotard[3] identifie le sublime, en termes d'histoire de l'art contemporain, tantôt au postmodernisme, tantôt au modernisme, comme il privilég tantôt la notion de présentation de l'imprésentable, tantôt la notation de la présentation du temps sous l'aspect du maintenant. Ces variations paraissent tout aussi constantes dans l'interprétation qui est fait de l'archéologie — Burke et Kant et, à un moindre de degré Hegel, et encore plus rarement Schiller — de la pensée contemporaine du sublime. Cette archéologie paraît souvent un moyen de réécrire, chez tel auteur, des données de sa réflexion antérieures aux premières références qu'il fait au sublime. Chez Jean-François Lyotard, l'identification du sublime au « Il arrive », à l'événement de l'œuvre, semble être la suite de telle indication de Discours, figure : « Tout art est re-présentatif […] : dans ce sens qu'il est renversant, qu'il renverse les rapports de l'inconscient et du préconscient, qu'il procède à des insertions du second dans le cadre du premier. Ce dernier recrée la différence de l'événement (nous soulignons). »[4] Chez Paul De Man[5], le sublime, qui est identifié, à partir de Kant, à un jeu du performatif contre le cognitif, apparaît comme une réécriture des arguments de Blindness and Insight et de Allegories of reading, autrement dit comme le dessin, en grande partie arbitraire, de l'attribution d'un antécédent proprement philosophique à la lecture du performatif et à l'affirmation du défaut de perspective cognitive du discours — particulièrement littéraire. Chez Theodor Adorno[6], la référence au sublim fait suite à une réflexion sur l'énigmatique de l'œuvre d'art à l'époque moderne ; elle apparaît comme le moyen de restituer à cet énigmatique une propriété de contenu. Ce contenu contredit la forme de l'œuvre : la référence au sublime la fois kantien et hegelien, permet de caractériser cette discordance. Chez Fredric Jameson[7], la tardive référence au sublime permet de réécrire la notion d'allégorie et de préciser l'utopie lors même que la notion de possible, reçue de Luckács, est devenue inopérante. Dans ce qui est, chez un philosophe analytique, Stanley Cavell[8], une réécriture, fort paradoxale chez un philosophe analytique, des thèses de la déconstruction, alors placées sous le signe du scepticisme, l sublime est le moyen de donner, à partir d'une philosophie exemplaire de la connaissance, celle de Kant, une caractérisation du défaut de fondation du langage. Dans le contexte contemporain, il y a bien des manières de caractériser les équivoques que font de tels jeux d'archéolog de tels jeux de références. Ces jeux traduisent un abandon du nietzschéisme — le sublime défini comme événement, par quoi il y a certainement un renvoi à Heidegger, défait l'hypothèse d'un pouvoir d'action supérieur du sujet. Ces jeux marquent encore l'abandon ou l'amoindrissement d'une pure référence marxiste — Theodor Adorno et Fredric Jameson — puisque, dans l'hypothèse du sublime, l'aliénation cesse d'être pensée en termes de dépossession et devient affrontemen avec l'infini du pouvoir. Ces jeux, chez Jean-François Lyotard et chez Paul De Man, traduisent enfin un refus de la norme de la règle : hors de la norme et de la règle artistiques, la référence au sublime permet de désigner un un principe, de la même manière que l'idée morale de Kant permet de justifier une pragmatique de la moralité sans que cette idée fasse préciser une règle morale. De façon similaire, le performatif exclut la visée cognitive du langage et reste cependant le moyen de reconnaître une pragmatique du langage — un certain jeu réglé du langage. Dans ce même contexte contemporain, il y a bien des manières de donner un arrière-fond à ces définitions. Cela peut êt un arrière-fond heidegerrien — il faudrait ainsi jouer avec la passibilité qui caractériserait le sujet qui perçoit et ressent l'effet du sublime, et la passiblité au sens et à l'ouverture du monde[9], qui sont des réécritures douces de l'ontique et de l'ontologique heideggeriens. Cela peut être un renvoi aux minimalismes artistiques. Il faudrait lire les reprises des distinctions kantiennes — jugement esthétique, jugement sublime, jeu libre de l'entendement et de l'imagination, discordance de l'imagination et de l'effet de l'infini du spectacle sublime — comme les moyens de limiter le pouvoir de l'art[10] et de revenir à une manière de minimal. C'est là une hypothèse paradoxale au regard du sublime, bien que le sublime du petit, qui n'est pas le sublime du minimal[11], puisse se prévaloir d'antécédents littéraires romantiques. II. LA DÉCISION CONTEMPORAINE DE FAIRE RÉFÉRENCE AU SUBLIME : POUVOIR ET EFFECTIVITÉ DE L'ŒUVRE D'ART ET DE L'ŒUVRE LITTÉRAIRE Toutes ces réécritures sont contemporaines les unes des autres, à l'exception de celle de Theodor Adorno, sensiblement antérieure. Elles définissent moins une séquence de l'histoire des idées — en termes d'histoire des idées, comment est-i possible de dire ce retour ? — qu'elles ne traduisent donc un mouvement anti-cognitif de la pensée — c'est un lieu commun que d'assimiler le sublime au performatif, à quoi s'apparente le fait d'identifier le contenu de la pensée de l'œuvre à un énigmatique qui s'applique à l'art et à la littérature. Cette perspective anticognitive est indissociable, d'une part, de l'abandon de la notion d'élévation, et, d'autre part, de l'insistance mise sur le jeu de double bind du sublime. interprété en termes défection de présentation d'une présentation et en termes d'effet. Cet abandon et cette insistance font du sublime ce qui peut être exactement à la mesure du sujet : le sublime n'est plus nécessairement identifiable au grand, au démesuré, d'une part, et, d'autre part, le double bind définit le sublime comme adéquat à l'envergure psychiqu du même sujet. Cet abandon et cette insistance sont indissociables d'une réécriture spécifique de Kant, qui court de Jacques Derrida à Jean-François Lyotard et à bien d'autres, et qui définit le sublime comme une présentation de l'imprésentable. Il a été avec raison souligné que cet imprésentable, malgré ce que suggère le mot — l'absence de l'objet de la présentation —, s'identifie à une manière de consistance et qu'il se distingue ainsi de la notation du supra-sensible chez Kant[12]. Comme le sublime est ici, à la différence de ce qu'il est chez Kant, essentiellement attaché à l'œuvre d'art, autrement dit à une production humaine, il apparaît explicitement comme le moyen de corriger un impouvoir, celui de la représentation, puisque, là, avec le sublime, l'œuvre substitue à une manière d'impouvoir, celui de la représentation, le pouvoir qu'atteste la présentation de l'imprésentable. On comprend qu'il y ait là une justification de l'identification du sublime à un minimalisme. Ce minimalisme qui efface le colossal fait paradoxalement du sublime ce qui est à la mesure l'homme et même uploads/Litterature/ bessiere-jean-le-sublime-aujourd-x27-hui.pdf

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