66 1. Introduction L ’amélioration de la qualité de la vie quotidienne consti-
66 1. Introduction L ’amélioration de la qualité de la vie quotidienne consti- tue depuis toujours une des préoccupations majeures de l’homme. C’est dans ce cadre que s’inscrit la recherche per- pétuelle de nouveaux matériaux plus performants et mieux adaptés aux exigences de l’époque. Cette recherche a ainsi permis la découverte des matières plastiques durant le pre- mier quart du 20ème siècle. A l’heure actuelle, les matières plastiques sont requises pour de très nombreuses applications à un point tel que nous ne pourrions imaginer la vie de tous les jours sans celles-ci ! Ces matières polymères sont utilisées dans des domaines de la vie quotidienne aussi divers que les secteurs de l’automobile, l’emballage, le bâtiment ou encore la cosmétique mais aussi dans des secteurs plus pointus : bio- médical, pharmaceutique, optoélectronique ou aéronautique. Bien que relativement récente, l’industrie des matières plastiques continue donc à représenter un domaine en pleine expansion (figure 1) avec une croissance moyenne annuelle, calculée sur ces 25 dernières années, de l’ordre de 7 %. La production annuelle actuelle en polymère de synthèse s’élève à près de 194 millions de tonnes (en 2003) ! Même si de nombreux polymères industriels sont produits de nos jours, quatre grandes familles se distinguent en terme de capacité de production : ce sont les thermoplastiques de masse ou plastiques de commodité qui englobent les polyolé- fines comme le polyéthylène (PE) et le polypropylène (PP), le polychlorure de vinyle (PVC) et le polystyrène (PS) (figure 2). A eux seuls, ils représentent plus de la moitié de la pro- duction mondiale en polymères de synthèse. La consommation en ces matériaux polymères ne va cesser de croître comme en témoignent les perspectives, qui estiment que d’ici moins de dix ans, la consommation mondiale en poly- mères de commodité, donc de grande diffusion, se rapprochera des 180 millions de tonnes par an. Une partie considérable de ces polymères synthétiques est destinée au secteur de l’emballage (tableau 1) qui représente près d’un quart de la consommation mondiale et même plus de 40 % de la consommation européenne ! Ces matières plastiques sont donc utilisées sur une période de temps très limitée et même extrêmement courte lorsqu’elle est ramenée à l’échelle de l’exis- tence du matériau. En effet, ces matériaux de grande diffusion sont constitués de chaînes de polymères hydrocarbonées saturées et dès lors de très haute stabilité chimique, physique et biolo- gique. Il convient dès lors de s’interroger sur le devenir de ces matériaux après leur utilisation. Tableau 1. Principaux secteurs d’applications des matières plastiques C h i m i e n o u v e l l e - N ° 8 6 - j u i n 2 0 0 4 Les (bio)polymères biodégradables : l’enjeu de demain ? Delphine RUTOT, Philippe DUBOIS*, Service des Matériaux Polymères et Composites, Centre de Recherche Materia Nova, Université de Mons-Hainaut, Place du Parc, 20, 7000 Mons Figure 1. Evolution de la production mondiale en polymères de synthèse Figure 2. Formule chimique des plastiques de commodité Secteurs Pourcentage utilisé Emballage 25% Bâtiment 21% Industrie électrique et électronique 15% Divers 11% Colles, peintures, vernis ... 10% Industrie automobile 07% Ameublement 05% Agriculture 04% Articles ménagers 03% Chimie des matières renouvelables 2. Méthodes de valorisation Théoriquement trois voies de valorisation des matières plas- tiques usagées peuvent être envisagées. 2.1. Valorisation de la matière ou recyclage Le plus souvent le matériau est recyclé pour la même utilisa- tion après nettoyage. L ’exemple classique est la collecte et le recy- clage des bouteilles de lait et de détergent en PEHD (polyéthylène haute densité) que l’on retrouve ensuite dans la couche centrale des bouteilles de détergent multicouches. Le produit recyclé intervient à hauteur de 25 à 40 % de la masse totale. Toutefois les propriétés des matières recyclées impures sont rapidement médiocres et nécessitent souvent l’addition de matiè- re vierge pour rehausser leurs performances. La réutilisation répétée d’une fraction de matière dont le niveau de dégradation des propriétés thermomécaniques (par recyclages successifs) est très élevé, est susceptible d’abaisser les propriétés de l’ensemble du mélange. Il faut donc évaluer et contrôler le pourcentage de matière recyclée et le niveau de dégradation admissible pour maintenir les propriétés de la matière mélangée. La valorisation de la matière est la solution la plus raisonnable pour environ 20 % des déchets. Pour favoriser le tri des emballages plastiques, un système de codage a été mis au point aux Etas-Unis (figure 3 où PET : polyéthylène téréphtalate ; PEHD et PEBD : polyéthylène haute densité et basse densité). Ce système est utilisé par un grand nombre de transformateurs en Europe. 2.2. Valorisation chimique (de la matière première) La valorisation chimique est la conversion du plastique en matière première (monomères, intermédiaires chimiques) qui sera ensuite réutilisée pour synthétiser de nouvelles molécules dans l’industrie pétrochimique. Cette voie encore balbutiante mais prometteuse est quelque fois appelée « retour au pétrole ». Ainsi apparaissent les premières unités (pilotes) industrielles visant à dépolymériser par hydrolyse/thermolyse des polymères commerciaux tels le PET afin d’en récupérer et revaloriser l’éthy- lène glycol et l’acide téréphtalique. 2.3. Valorisation énergétique La valorisation énergétique par combustion est très utilisée lorsque les objets récupérés sont de petite taille. Il n’est en effet pas judicieux ni écologiquement favorable de vouloir recycler des pots de yaourts ou des emballages de fromages divers lorsque l’on sait que pour ce faire, il faudrait laver chaque objet après son utilisation et que, pour obtenir une tonne de matière recyclée, il faudrait collecter et laver entre 200.000 et 700.000 emballages. La valorisation énergétique des matières plastiques après leur première utilisation présente l’avantage d’un bilan énergétique meilleur que celui des produits recyclés. Il paraît de plus en plus évident que ces trois voies de valorisation sont complémentaires. Mais on sait déjà que le succès futur de cette stratégie dépendra en premier lieu du niveau de collecte et de tri des emballages dans les communes elles-mêmes. A long terme, des procédés perfor- mants de retour au pétrole devraient jouer un rôle important en ce qui concerne le coût environnemental. 3. La biodégradabilité 3.1. Définition de la biodégradabilité Une quatrième voie de valorisation des matières plastiques consiste à dégrader ceux-ci une fois leur tâche remplie. Cette voie fait appel aux matières polymères biodégradables. Mais qu’en- tend-on exactement par biodégradabilité ? Selon le Larousse, « biodégradable se dit d’un produit industriel qui, laissé à l’aban- don, est détruit par les bactéries ou autres agents biologiques ». En paraphrasant cette définition, on pourrait dire qu’un matériau biodégradable se prend en charge lui-même pour sa propre élimi- nation. Toutefois, cette définition est trop générale. Plusieurs autres acceptions existent, variables en fonction des auteurs, des méthodes de mesure de la biodégradabilité ou selon que la dégra- dation s’effectue dans le sol, l’eau, en milieu de compostage ou en décharge. Néanmoins, un consensus s’est dégagé autour de la notion d’impact sur l’environnement : un matériau est dit biodé- gradable s’il est dégradé par des microorganismes (bactéries, champignons), le résultat étant la formation d’eau et de CO2 (CH4) et, éventuellement, d’une nouvelle biomasse non toxique pour l’homme et pour l’environnement. 3.2. Processus de biodégradation Les processus mis en jeu lors de la biodégradation ont été identifiés. Une première phase est une détérioration du produit, sous l’influence d’actions extérieures : mécaniques comme le broyage, chimiques comme l’irradiation par les ultra-violets ou thermiques comme la phase de pasteurisation en compostage. Durant cette étape, des champignons microscopiques et des bac- téries ou d’autres êtres vivants (vers de terre, insectes) peuvent aussi fragmenter le produit : on parle alors de biofragmentation. Cette première étape est très utile car elle a pour résultat l’aug- mentation de la surface du matériau en contact avec les microor- ganismes intervenant dans la deuxième phase. Celle-ci corres- pond à la biodégradation proprement dite. Des microorganismes attaquent et digèrent le produit, lequel est transformé en métabo- lites qui sont assimilés par les microorganismes. Cette deuxième phase est souvent concomitante de la première. Ces processus sont illustrés à la figure 4. C h i m i e n o u v e l l e - N ° 8 6 - j u i n 2 0 0 4 67 Figure 3. Codification pour le tri des déchets plastiques Les (bio)polymères biodégradables : l’enjeu de demain ? Chimie des matières renouvelables 68 3.3. Mesure de l’indice de biodégradabilité et normalisation européenne Placés dans des conditions similaires, deux matériaux de com- position différente se dégraderont selon des délais de temps très inégaux. Ce critère de durée est utilisé pour définir l’indice de bio- dégradabilité d’un matériau. Celui-ci est calculé en général sur 28 à 60 jours pour les tests de laboratoire en milieu liquide et 90 jours en milieu de compostage. La biodégradation d’un matériau donné pourra alors varier selon les conditions climatiques (température, pluviométrie) et le type de sol (pH, composition, texture). Les méthodes de mesure de l’indice de biodégradabilité peu- vent être divisées en deux catégories : les tests in vitro, ou test de Sturm, qui reposent sur une mesure de la production de CO2, de uploads/Industriel/ biopolymeres-2.pdf
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- Publié le Dec 25, 2022
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