BnF, Département de la conservation – Thierry Aubry Août 2009 L LA A R RE ES ST
BnF, Département de la conservation – Thierry Aubry Août 2009 L LA A R RE ES ST TA AU UR RA AT TI IO ON N D DE ES S A AI IS S D DE E B BO OI IS S Les ais de bois sont utilisés pour protéger les livres durant tout le Moyen-âge et sont progressivement remplacés par du carton à partir de la fin du XVe siècle. Majoritairement en hêtre ou en chêne, on trouve aussi dans une moindre mesure d’autres essences. Ils sont le plus souvent débités sur quartier, ce qui constitue la forme la plus stable de coupe par rapport aux tensions internes du bois. Les marques de techniques ou d’outils employés sont fréquemment visibles sur les surfaces du bois, accentuant la valeur « archéologique » de ces parties du livre. Leurs formes et épaisseurs évoluent tout au long du Moyen-âge1, notamment pour ce qui est des chanfreins et mode de passage des supports de couture. Ils s’affinent considérablement à la fin du Moyen-âge avant d’être remplacés par du carton. ill. n° 1 : Ouvrage dont les deux ais ont été restaurés Ci-dessous, ais coupé sur quartier comme en témoignent les rayons médullaires dont le détail est clairement visible à droite 1 Pour tous ces aspects historiques, nous conseillons la lecture de l’ouvrage de SZIRMAI, J. A. : "The archaeology of medieval bookbinding", Ashgate, Publishing Limited, Gower House, Croft Road, Aldersohot, Hants GU11 3HR, England, 1999, 352 p BnF, Département de la conservation – Thierry Aubry Août 2009 ill. n° 2 ais coupé sur quartier ill. n° 3 : détail des rayons médullaires HISTORIQUE DE LA RESTAURATION DES AIS DE BOIS La restauration des ais n’est pratiquée que depuis une période récente. Si on trouve des traces de réutilisation d’ais au Moyen-âge (cf. ill. n° 4) ou, parfois plus tardivement de réparation (cf. ill. n° 6), ceux-ci ont été abondamment remplacés et les reliures refaites à la Renaissance, au XVII ème et au XVIII ème siècle. Au XIX ème siècle,. Ils sont toujours remplacés et il n’est pas rare d’en trouver des imitations, réalisés en carton, notamment sur des reliures rétrospectives (cf. ill. n° 5) ill. n° 4 : traces de réemploi d’ais à la période médiévale BnF, Département de la conservation – Thierry Aubry Août 2009 ill. n° 5 : Imitation d’un ais en bois réalisé en carton sur une reliure rétrospective ill. n° 6 : ci- dessus, réparation effectuée avec une bande de parchemin de réemploi, probablement au XVII ème siècle ill. n° 7 : à droite, restauration datable des années 1970/80. La partie jugée trop vermoulue de l’ais a été supprimée A l’exception de quelques traitements difficilement datables, les premières restaurations sont effectuées dans les années 1960/70/80 et consistent surtout en la suppression (amputation) des parties vermoulues afin d’atteindre les parties "saine" du bois - une greffe est ensuite effectuée avec un bois de même essence et maintenue par collage (colle à bois de nature vinylique ou protéinique) et assemblages divers (cf. ill. n°8 et 9). On note cependant une prépondérance de l’utilisation de papillons (cf. ill. n° 11). Notons que pour ces traitements, les bords de la lacune et du bois d'apport étaient rabotés ou coupés de façon rectiligne (cf. ill. n° 7, 10). BnF, Département de la conservation – Thierry Aubry Août 2009 . ill. n° 8 : détail du mode d’assemblage ill. n° 9 : idem. La couleur de l’adhésif laisse penser qu’il s’agit d’une colle protéinique. ill. n° 10 : restauration du coin d’un ais ill. n° 11 : schéma d’une restauration d’un ais à l’aide d’un papillon ill. n° 12 : remplacement d’un ais considéré comme ne remplissant plus sa fonction. Il est probable qu’aujourd’hui, l’ais déposé aurait été consolidé et remis en place. BnF, Département de la conservation – Thierry Aubry Août 2009 L’autre option, très fréquente, consistait en la réfection complète de l'ais, « à l’identique » lorsque celui-ci était considéré comme trop fragile (cf. ill. n° 12). Aujourd’hui, en parallèle de l'évolution des techniques, de l’approche de la conservation-restauration, et notamment du désir d’un degré d'intervention moins important, ces méthodes d'élimination complètes ou même partielles du matériau d’œuvre, bien qu’encore pratiquées, ont considérablement diminué. Dans ce domaine, l’influence de la restauration d'objets archéologiques, en particulier des bois gorgés d’eau, et de la restauration du mobilier ou de la sculpture a constitué un apport considérable, tant pour ce qui concerne les techniques de comblement des lacunes que de celles de comblement et de consolidation de galeries d'insectes xylophages POURQUOI ET DANS QUELS CAS FAUT-IL RESTAURER OU REMPLACER LES AIS ? Il est difficile d’apprécier la résistance minimum que doit avoir un matériau d’œuvre pour être conservé in situ, ou remplacé. Cette appréciation est parfois très variable d’un restaurateur à l’autre ou d’un conservateur à l’autre. Cela dépend bien sûr de la destination du document, de son usage, de sa conservation, mais en tout état de cause ce n’est plus tant ici pour un ais sa fonction de protection du corps d’ouvrage (cet aspect pouvant être considérablement amélioré par l’ajout d’un conditionnement), ou sa fonction mécanique qui sont au premier plan (la valeur d’usage de ces documents n’étant plus celle d’autrefois). Aujourd’hui, le véritable enjeu réside dans la conservation de l’intégrité de l’objet patrimonial. Pour autant, bien sûr, les aspects mécaniques et de protection ne seront pas exclus de la réflexion mais viendront se soumettre à cette première notion et non pas s’y substituer pour autoriser la réfection à l’identique ou le remplacement de ces parties du livre. En présence d’ais la valeur d’ancienneté et la valeur historique2 d’un livre sont forcément prépondérantes. Il est de plus en plus admis qu’une approche consistant en la dépose et la restitution des parties anciennes d’un document, par exemple dans une boîte de conservation doit être soumise à d’importantes réserves car la perte de valeur archéologique3 ainsi que le déficit associé quant à l’étude postérieure de l’oeuvre sont inévitables et irrémédiables. De fait, une fois démantelés, les éléments peuvent se perdre et la séparation, même si les parties déposées sont restituées avec l’objet, entraîne forcément une perte d’informations relatives à tous les aspects techniques reliant auparavant les ais au corps d’ouvrage : âmes dépassantes des tranchefiles, claies dépassantes ; supports de couture etc. En tout état de cause, et à moins d’être confronté à un cas de dégradation extrême de l’ais (cf. ill n° 13), il apparaît essentiel de garder in situ tous les éléments d’œuvre d’un livre et d’en conserver l’intégrité physique tout en faisant le maximum pour stabiliser les dégradations, ce qui heureusement est souvent possible (cf. ill. n° 16) ill. n° 13 : Cas d’altération extrême d’un ais 2 La valeur d’ancienneté est ici considérée selon l’acceptation d’Aloïs Riegl qui distingue pour les édifices les valeurs de passé et les valeurs de contemporanéité. Les premières comptent la valeur historique, et la valeur d’ancienneté. Les secondes sont notamment constituées par la valeur d’usage et la valeur d’art 3 Bien qu’aucune valeur spécifiquement archéologique ne soit distinguée par Aloïs Riegl, on peut considérer qu’elle soit assimilée ou incluse dans les deux valeurs citées dans la note n° 1. BnF, Département de la conservation – Thierry Aubry Août 2009 LES TRAITEMENTS DE CONSERVATION : VERIFICATIONS DE LA PRESENCE DE LARVES D’INSECTES XYLOPHAGES ET LEUR ELIMINATION Avant d’en venir aux traitements de conservation, il faudra vérifier l’aspect sanitaire du bois. En effet, les traitements des ais sont souvent consécutifs à une dégradation du bois par des larves d’insectes xylophages (cf. ill. n° 13). Pour déterminer si ces dernières sont actives, il est conseillé d’extraire la sciure présente dans l’ais, par aspiration en tapotant légèrement le bois. En répétant cette opération après quelques jours ou semaines, la présence de sciure récemment produite confirmera l’activité des larves au cœur de l’ais. On peut aussi simplement poser l’ais sur une feuille blanche durant 15 jours minimum et ainsi localiser la larve. Si tel est le cas, avant toute intervention, il est fortement recommandé de pratiquer une anoxie (privation d’oxygène) afin de tuer les imago (insecte adulte)larves et les œufs présents dans le bois. CONSOLIDATION ET COMBLEMENT DES GALERIES D’INSECTES XYLOPHAGES Ce travail constitue souvent un préalable au comblement des lacunes qui sera abordé ultérieurement. En effet, ces dernières sont souvent situées là où des galeries ont fragilisé le bois. Le contour de la lacune est donc irrégulier, fragile et ne permettra pas le collage en bord à bord, en suivant le contour, d'une pièce de bois - méthode aujourd'hui souvent retenue. Toutefois, et avant d'essayer de combler les galeries, on pourra si cela est nécessaire, tenter de consolider le bois en faisant pénétrer des adhésifs comme des résines acryliques (Paraloïd B72®) diluées dans l’acétone par exemple. Celui-ci sera préparé en différentes concentrations. Une très faible concentration pénétrera mieux, suivi par une concentration plus importante. On peut imaginer différentes méthodes d’imprégnation dans le bois mais on déconseillera l’immersion pour son caractère trop interventionniste. Par contre, l’infiltration peut se faire par un goutte à uploads/Histoire/ ais-bois-stare-knnjige.pdf
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- Publié le Sep 20, 2022
- Catégorie History / Histoire
- Langue French
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