Toponymes Patrimoine - Noms des lieux habités de Kabylie (noms composés) Par Ra
Toponymes Patrimoine - Noms des lieux habités de Kabylie (noms composés) Par Ramdane Lasheb (quotidien La Dépêche de Kabylie – 17 juin 2009) Les traces de l’activité humaine en Kabylie remontent à la préhistoire, comme l’attestent les nombreuses découvertes archéologiques telles que l’industrie lithique, les gravures et les peintures rupestres [1]. Elles témoignent de l’activité et de la présence humaine permanente. Quant aux premiers contacts avec le monde extérieur, ils remontent aux Phéniciens (Carthaginois) qui, par les nombreux comptoirs commerciaux longeant la côte kabyle, ont noué certainement des liens commerciaux. Les Romains, les Byzantins, les Arabes et les Turcs se succédaient et les montagnes sont restées inaccessibles aux différentes intrusions. La Kabylie du Djurdjura resta indépendante et autonome. Ce fut donc les Français qui parviennent, pour la première fois de l’histoire, à occuper les montagnes en 1857, en venant à bout de la résistance [2] 27 ans après la chute d’Alger. Il a fallu mobiliser une armée de 25 000 hommes équipés d’un matériel des plus sophistiqués à l’époque, sous la conduite du général Randon et du maréchal Mac Mahon en "pratiquant la politique de la terre brûlée pour acculer à la reddition les villages et les tribus que les combats n’avait pas pliés" [3]. Par économie de terrain et de défense, les autochtones construisirent leurs habitations sur les cols, les collines et les gorges étroites impropres à toute culture (apiculture, agriculture). Ils réservèrent les pentes pour les cimetières et les terrains à bas relief à l’agriculture. Ainsi, tous les villages se ressemblent dans leurs structures et dans leurs situations géographiques ; l’étude d’un seul suffit pour comprendre toute l’organisation sociale des Kabyles. Taddart (village) vient du mot dder (vivre) et taddart signifie lieu de vie. Le village est constitué de groupes familiaux consanguins appelés taxarubt (fraction), puis autour d’elle viennent se grouper d’autres familles étrangères pour former adrum (quartier). Il peut y avoir deux ou plusieurs quartiers dans un village et un certain nombre de villages forment l’aârch (tribu) et ensuite taqbilt (une confédération de tribus) si c’est nécessaire pour faire face à un envahisseur. En parallèle, d’autres fractions se forment de la même façon et l’ensemble des quartiers forme un village : adrum1+adrum2+adrum3 = taddart (village) Par ordre de grandeur croissant, on obtient : axxam - taxarubt - adrum - taddart - aârch – taqbilt Cependant, il existe des petits villages issus d’un seul ancêtre. Dans ce cas, taxarubt (fraction) se confond avec adrum (quartier). Pour distinguer les habitants des villages, il a fallu donner des noms à chacun d’eux et "le lieu marque l’homme qui l’habite et l’homme s’identifie au lieu habité" [4]. Ainsi chaque nom véhicule l’histoire de ses habitants. Hmed Zayed écrivait: "Le toponyme est une forme de fossile où sédimente une somme de faits linguistiques, historiques, sociaux et géographiques." Le relief de la région, ses mythes, ses légendes et son organisation sociale furent la base de la toponymie de ces lieux habités. Les noms des lieux peuvent êtres modifiés au cours de l’histoire : dénomination et nomination selon la colonisation. Les noms des lieux habités de Kabylie sont en général des noms composés : Exemples : Tawrirt Mussa At yidir Iril N’Wemmas Un nom composé est constitué de deux parties : - La base ou le premier composant. - Le second composant. Exemples : Tawrirt Mimun Tawrirt : base ou premier composant. Mimun : second composant. Le second composant est nécessaire pour différencier les noms : Exemple : Tawrirt Mussa Tawrirt Muqran Tawrirt Aden Tawrirt Mimun Ces quatre noms ont tous une même base (taourirt), le second composant est donc nécessaire pour distinguer un nom d’un autre. Bases des noms habités : A. Noms à base de montagne : 1) Montagne : Adrar : montagne Adrar Ufarnu Awrir : colline Awrir Uzemmur Tawrirt : colline Tawrirt Mussa Agemun : mamelon Agemun N’ Izem Iril : crête Iril N’wemmas Tirilt : crête Tirilt lhao Ali Tizi : col Tizi-Wezzu Agni : terrain plat se terminant par une montée Agni Gerran Lbur : champ non cultivable Lbur Hemmu 2) Champs : Alma : prairie Alma n Waman Iger : champs de céréales Iger Gedmim Tigert : // // Tigert n Werlis Tamazirt : jardin Tamazirt Urabah Timizar : jardin Timizar Lerbar Arqub : plaine Arqub N Tbarda Urti : // // Urti Weqqac Tasga : // // Tasga Mellul Azarar : plaine Azarar Ukerruc 3) Rochers : Adrar : rocher Adrar Acebhan Azru : pierre Azru Uqellal Tazrutt : // Tazrutt N Awda Tizra : pierres Tizra Aysa B. Noms à base d’eau : Tala : fontaine Tala n Lluh Irzer : ravin Irzer Amuqran Asif : rivière Asif n Lhemmam Tamda : étang Tamda n Wezwir Tarwint : source Tarwint u Lexrif Tirwinin : sources Tirwinin Ufella C. Noms à base d’habitat : Taddart : village Taddart Ufella Lazib : ferme Lazib Hmed Lhara : place Leara Ufella Taxamt : chambre Taxamt Loir Axxam : maison Axxam n Hmed D. Noms à base de plante : Documents Tadekkart : figuier Tadekkart Uzeoig Tazebbujt : olivier sauvage Tazebbujt Tizi Tasaft : chêne Tasaft Ugemun Tamadart : maquis Tamadart n Hemmuc Azemmur : olivier Azemmur Aysa E. Noms à base de jours : Leoma : vendredi Leoma n Sario Larba : mercredi Larba n at. Wasif F. Noms à base d’homme : At+Anthroponyme At : celui de At yidir Sidi : seigneur Sidi Smaïl Abid : serviteur Abid Camlal Bibliographie : 1. Adli Younès, 2004, La Kabylie à l’épreuve des invasions, Editions Zyriabes Algérie. 2. Ahmad Zayed Malika,1999, "Toponymie villageoise kabyle" in Revue Tiziri n°17, Bulletin de l’association culturelle n imazighen de Belgique 3. Boulifa Si Amar,1925, Le Djurdjura à travers l’histoire, Bringau, Alger. 4. Cheriguen Fodil, 1993, Toponymie algérienne des lieux habités. Les noms composés, Épigraphe, Alger. 5. Dahmani Mohammed, 1987, Économie et société en grande Kabylie, OPU, Alger. 6. Hanoteau A. et Letourneux A., 1893, La Kabylie et les coutumes kabyles, Challamel, Paris. 7. Mahe Alain, 2001, Histoire de la Grande Kabylie, Editions Bouchène, Paris. 8. Mahe Alain, 2001, Présentation de la grande Kabylie sous le régime turc (1874), de Joseph Nil Robin, Editions Bouchène, Paris. 9. Mahe Alain, 2001, Notes historiques sur la grande Kabylie de 1830 à 1838, présentation de Joseph Nil Robin(1876), Editions Bouchène, Paris. 10. Pelligrin, 1949, Essai sur les noms des lieux d’Algérie, de Tunisie, étymologie et interprétation, edition S.A.P.I, Tunis. 11. Direction de la planification et de l’aménagement du territoire "listes des villages par commune" 1996. uploads/Geographie/ toponymes-source-m-ramdane-lasheb-pdf.pdf
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- Publié le Oct 03, 2021
- Catégorie Geography / Geogra...
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