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Tous droits réservés © Société d'Histoire de la Guadeloupe, 2003 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/ Document généré le 19 sep. 2020 19:58 Bulletin de la Société d'Histoire de la Guadeloupe Saint-Eustache aux XVIIe et XVIIIe siècles Gérard Lafleur Numéro 130, 4e trimestre 2001 URI : https://id.erudit.org/iderudit/1043134ar DOI : https://doi.org/10.7202/1043134ar Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) Société d'Histoire de la Guadeloupe ISSN 0583-8266 (imprimé) 2276-1993 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Lafleur, G. (2001). Saint-Eustache aux XVIIe et XVIIIe siècles. Bulletin de la Société d'Histoire de la Guadeloupe, (130), 27–45. https://doi.org/10.7202/1043134ar Saint-Eustache aux XVIIe et XVIIIe siècles1 par Gérard Lafleur L'importance de Saint-Eustache s'impose à tous ceux qui s'intéres­ sent à l'histoire des petites Antilles et à celle des relations commerciales entre les Antilles, l'Europe et l'Amérique du Nord au XVIIe et au XVIIIe siècles. Elle occupait une place centrale et particulière dans la zone, qui peut être seulement comparée à celle de Saint-Thomas, proche des gran­ des Antilles. Leurs activités étaient centrées sur le commerce interlope, la contrebande et toutes les activités en marge des administrations étati­ ques. Zones de liberté, elles furent également des lieux de refuge pour les minorités religieuses persécutées et notamment les juifs. Saint-Eustache possédait des atouts importants qui étaient largement utilisés par les au­ torités hollandaises et les habitants des possessions anglaises et françai­ ses proches. Sa position au centre de celles-ci en faisait un carrefour incontournable pour tous ceux qui n'avaient de cesse de lutter contre l'exclusif de l'une ou de l'autre nation et des compagnies à monopole. À vue de Saint-Christophe, franco-britannique jusqu'à 1702, de Névis, proche d'Antigues, de la Guadeloupe et plus loin de la Martinique, c'était une destination facile pour de petits navires venant de ces territoires. Sa position se renforce après 1763, le traité de Paris ayant fait disparaître les îles dites neutres de la Dominique, de Saint-Vincent et de Sainte-Lucie. De plus, ces dernières îles, en devenant officiellement anglaises et fran­ çaise vont accroître les territoires susceptibles de se livrer à la contre­ bande et réduire ceux susceptibles d'abriter tranquillement les activités clandestines. La superficie de l'île est modeste, 25 km2, encore plus modeste si l'on considère la partie utile. Le centre économique, Lower Town, est une étroite bande de terre au pied d'une falaise sur laquelle se trouve la ville et son fort, censé défendre l'île, mais en réalité uniquement capable de protéger les navires marchands des pirates. Bien que cette bande de terre 1. Cet article fait suite au voyage organisé par la Société d'histoire de la Guadeloupe à Saint- Eustache du 2 au 4 juin 2001. ait été agrandie par une espèce de polder, elle restait toutefois assez mo­ deste pour le trafic qui s y faisait. Le reste de l'île, constitué d une petite plaine et de deux sommets volcaniques, n'a jamais permis une grande agriculture et celle-ci fut tou­ jours marginale dans les activités économiques, sauf au tout début de la colonisation et après la Révolution française. I - ÉMERGENCE D'UNE PLACE COMMERCIALE Lors de l'arrivée des premiers colons, l'île était à la marge du territoire caraïbe et n'était peuplée que de quelques Amérindiens qui ne semblaient pas être des Caraïbes.1 Nous savons que les Anglais et les Français prennent officiellement possession de Saint-Christophe en 1626. L'année suivante, les Anglais em­ piétant sur la partie française, le roi envoya M. de Cussac avec une flotte pour les repousser et protéger la nouvelle colonie. Il arriva en août 1629 et, après avoir repoussé les Anglais dans leurs limites et renouvelé le traité de partage, en attendant la flotte espagnole annoncée, en septembre 1629, il « prit la décision d'aller habiter l'île de Saint-Eustache qui n'est qu'à trois lieues de Saint-Christophe. C'est une petite île pourvue de la plus forte assise des Antilles d'Amérique. Il y alla, la considéra et jugeant ce poste très avantageux à la nation française, il fit bâtir un fort en sa pré­ sence, qui est celui que les Hollandais possèdent aujourd'hui, autour du­ quel il fit faire par ses gens une fort belle habitation. » Et le R. P. Du Tertre poursuit : « En passant dans cette île, j'y ai trouvé de vieux habi­ tants français qui y étaient avec M. de Cussac quand il l'habita. Il est probable que nos Français l'ont abandonnée du fait qu'elle n'a aucune rivière, ni de fontaine d'eau douce, les Hollandais y ont remédié en y faisant d'excellentes citernes. »2 En décembre 1635, toutefois, Jan Snouck, un m arin entreprenant de Flushing, village proche de New Amsterdam, la future New York3, et per­ sonnage destiné à jouer un rôle im portant dans l'histoire des îles sous le Vent hollandaises, reçoit la permission de la chambre zélandaise de la WIC (West Indies Company) de fonder une colonie dans une île inhabitée des West Indies. L'expédition de Snouck partit pour Sainte-Croix4, mais sans doute parce que les Anglais s'y étaient établis les premiers, elle renonça. Après s'être arrêtés dans plusieurs îles, 50 colons dirigés par Pieter Van Corsel- les, le fondateur de la colonie hollandaise de Tobago, choisirent de s'ins­ taller à Saint-Eustache. Un fort est rapidement érigé sur les ruines du vieux fort français et l'île fut rebaptisée New Zeeland. Snouck informa ses patrons, les marchands zélandais Abraham Van Pere et Pieter Van 1. Les chroniqueurs indiquent qu’à Saba les Amérindiens sont d une autre culture par le fait qu’ils portent la barbe et ne sont point parents des Caraïbes. Voir G. Lafleur, Les Caraïbes des petites Antilles, Karthala, 1992, p. 15. 2. J.-B. Du Tertre, Histoire générale des Antilles, éd. Kolodziej, 1978, 1.1, p. 49-50. 3. Flushing : village de l'État de New York, sur la baie de Flushing, à 10 km au N-E de Brooklyn. New York se nommait Nouvelle-Amsterdam et était hollandaise. 4. Sainte-Croix devint française plus tard et fut abandonnée par les Français en 1696. Elle fut cédée au Danemark. Voir Aimery Caron, « Sainte-Croix française » dans Bulletin de la Société d ’ histoire de la Guadeloupe, n° 79-82, p. 3-29. Rhee. Il essaya de promouvoir son île en déclarant fortement que « du bon tabac pourrait être planté et que de grands profits pourraient être tirés. » Sitôt la colonie reconnue par le gouvernement des Provinces-Unies, le fort construit, les colons se m ettent à cultiver le tabac et deux ans après, leur récolte est envoyée à Flushing. Des travailleurs amérindiens sont importés pour travailler sur les plantations de tabac. Ces derniers étaient capturés dans les autres îles et dans les Guyanes jusqu'en 1645. Durant les 20 à 30 années qui suivirent la prise de possession de Tîle, celle-ci ne changea pas beaucoup, sauf que la principale production de­ vint le sucre, am enant une forte augmentation du nombre d esclaves.1 Nous savons que dans les débuts de la colonisation française, les Hol­ landais furent les principaux bénéficiaires de celle-ci. Les navires m ar­ chands parcouraient la zone, secourant les colonies françaises affamées par les carences des différentes compagnies. Ils amenaient les fournitures nécessaires à la vie et en contrepartie, prenaient tout ce que produisaient les îles, tabac en premier, mais aussi coton, canifice2 , gingembre, indigo... Comme le dit le R. P. Du Tertre, les Hollandais ont tiré tout le miel des Antilles françaises, ce qui aboutit entre autres d ailleurs à la ruine des compagnies à monopole. Dans ces conditions, ils avaient besoin d entrepôts et Saint-Eustache constituait un poste idéal. C'était un relais sur la route du Brésil jusqu'en 1654, et sa position se renforça après cette date avec l'arrivée des Hollan­ dais dans les Antilles (françaises et anglaises) et la vulgarisation de la culture de la canne et de la production du sucre et du rhum, culture effectuée par une main-d'œuvre servile. Devenue centre du commerce interlope en direction des îles voisines, elle devint un objet de convoitise pour tous les aventuriers de la zone sous prétexte de défendre les intérêts nationaux. Elle changea plusieurs fois de maître lors de la deuxième moitié du XVIIe siècle. Néerlandaise jusqu'en 1665, anglaise, puis française, puis néerlandaise, puis anglaise, puis néerlandaise, puis anglaise, néerlan­ daise, française, anglaise... Ces prises successives étaient l'occasion de pillages et s'apparentaient plus à des opérations de pirateries qu'à des conquêtes militaires. Comme pour les autres petites Antilles, les moyens de défense étaient réduits et il ne s'agissait que d'éloigner les corsaires ou les bateaux enne­ mis isolés en cas de guerre ou les pirates en temps de paix. Si une flotte importante arrivait, on tentait de gagner du temps pour permettre aux navires marchands de s'échapper et les défenseurs ne tardaient pas à uploads/Geographie/ saint-eustache-aux-xviie.pdf

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