Comprendre le Conseil Constitutionnel du Cameroun De la complexité des interfér
Comprendre le Conseil Constitutionnel du Cameroun De la complexité des interférences socio-politiques et juridico-administratives Par Faustin ETOUKE, Épistémologue, Moniteur de Sciences Politiques, Faculté des Sciences Juridiques et Politiques – Université de Yaoundé II Soa Un homme politique bien connu, du 10ème siècle av. J.C., s’est exprimé en ces termes : « Instruis l’enfant selon la voie qu’il doit suivre ; et quand il sera vieux, il ne s’en détournera pas »1. Sous le vocable de SOCIALISATION, cette même idée a été reprise par plusieurs sociologues. Dans l’environnement francophone des sciences sociales, Pierre Bourdieu parle de l’INTÉRIORISATION DE L’EXTÉRIORITÉ, pour exprimer ce mécanisme social, par lequel l’enfant ou les jeunes esprits sont formatés, pour qu’ils acquièrent les valeurs particulières d’une société donnée. En effet, chaque société est caractérisée par des valeurs qui lui sont propres. Blaise Pascal disait « Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà » pour bien faire comprendre que les valeurs qui fondent la société française, ne sont pas tout à fait identiques aux valeurs qui fondent la société espagnole. Et si on revient au niveau du Cameroun, — où une forme d’organisation étatique "moderne" a commencé à être greffée, en 1884, PAR LA VIOLENCE MILITAIRE DE L’ALLEMAGNE, sur les 1 Salomon (troisième souverain de la monarchie hébraïque), Livre des Proverbes, Chapitre 22, Verset 6. nombreuses sociétés tribales qui étaient implantées sur le territoire du KAMERUN —, il s’agit de comprendre que derrière l’ethno-politique, se cachent les véritables valeurs qui fondent la société camerounaise. Pour un chercheur proche des sciences sociales, la neutralité axiologique sous- entend que le chercheur ne doit pas porter un jugement de valeur, sur les éléments qui fondent son objet d’étude. Dit autrement, nous ne sommes pas habilité, dans le cadre d’une analyse scientifique, à dire si l’ethno-politique camerounaise est bonne ou mauvaise, mais seulement à disséquer ce mécanisme culturel. Aussi, allons-nous contourner cet obstacle épistémologique, en procédant par comparaison, entre l’environnement sociologique français et l’environnement sociologique camerounais, pour que chaque compatriote se fasse sa propre idée sur la question. Sur le territoire de la France, depuis la Révolution de 1789, pour gommer les clivages ethniques, les révolutionnaires ont entrepris de créer et d’imposer une langue unique, qui est le "français" que nous manipulons actuellement. Cette langue est devenue le véhicule naturel D’UN AUTRE MÉCANISME CULTUREL, également imposé par les révolutionnaires, à savoir l’ÉCOLE. Après deux (02) siècles d’expérimentation, les résultats de cette entreprise semblent parler d’eux-mêmes, puisque la plupart des citoyens français semblent trouver "naturel" d’avoir, en partage, une seule et même langue. Bien plus, les valeurs culturelles de la société française qui ont ainsi été créées depuis 1789, sont ouvertement promues et enseignées dans le système éducatif français. En particulier, les FACULTÉS DE DROIT implantées sur le territoire français, inculquent aux étudiants, des valeurs culturelles que lesdits étudiants retrouveront et reconnaîtront, dans la société française, après leurs études. A contrario, sur le territoire du Cameroun, depuis le retour du multipartisme au début des années 1990, des acteurs socio-politiques proéminents ont entrepris de s’appuyer sur des clivages ethniques. Au lieu de chercher à créer une (01) seule langue nationale, bâtie à partir du pidgin ou du camfranglais, ou à défaut même, de se contenter de faire vivre efficacement nos deux (02) langues officielles (anglais et français), ils ont plutôt encouragé le développement exacerbé du repli identitaire, où chaque "bon citoyen" camerounais doit parler son patois. Bien plus, dans le système éducatif camerounais, les activités périscolaires qui sont les plus dynamiques, sont celles qui s’appuient sur une clé ethno-régionale, et non pas sur une clé technico- idéologique. En particulier, les FACULTÉS DES SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES implantées sur le territoire camerounais, inculquent aux étudiants, des valeurs culturelles que lesdits étudiants ne retrouveront, ni ne reconnaîtront, dans notre société, après leurs études, car, les valeurs culturelles de la société camerounaise reposent sur l’ethno-politique, et non pas sur les dogmes juridiques inculqués auxdits étudiants, et dont certains illustres Professeurs veulent habilement se prévaloir. Dans un document produit par le BUCREP2, intitulé Répertoire actualisé des villages du Cameroun, un Village est défini comme « une unité de commandement traditionnel ayant à sa tête un chef de troisième degré dépendant généralement d’un chef de deuxième ou de premier degré ». Notre pays compte environ 17 000 villages organisés dans un système pyramidal. Et, si on tient compte du fait qu’il y a une vingtaine d’années, M. Biya s’est fait introniser CHEF SUPÉRIEUR dans la plupart des chefferies traditionnelles de premier degré, il faut en conclure qu’il a été suffisamment malin pour être présent, aussi bien au centre des valeurs culturelles réelles camerounaises (ethno-politique), qu’au centre des valeurs culturelles artificielles camerounaises (édifice juridique chapeauté par le Conseil Constitutionnel)… En d’autres termes et dans un cadrage général, il importe de savoir que pour ce qui concerne l’environnement sociologique camerounais, TOUTE ARGUMENTATION BÂTIE SUR DES CONSIDÉRANTS JURIDIQUES, est fondamentalement empreinte de roublardise, car ce ne sont pas les "codes juridiques en vigueur au Cameroun" qui sont le véritable moteur des actions sociétales dans notre pays. Et pour ce qui concerne, spécifiquement, le contentieux qui fait actuellement couler beaucoup d’encre et de salive, à savoir LE CONTENTIEUX DEVANT LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL relatif à l’élection présidentielle du 07 octobre dernier, il faut se rendre à l’évidence que, c’est essentiellement une représentation scénique destinée à l’audience des institutions internationales, pour ne pas dire occidentales. En effet, à proprement parler, en quoi est-ce que ces histoires d’ÉTAT DE DROIT ou d’ALTERNANCE POLITIQUE, concernent véritablement le pathos négro-africain, ou même le pathos camerounais Au demeurant, et eu égard à l’observation des différents protagonistes ayant eu à s’exprimer hier, 16 octobre 2018, au cours de l’audience du Conseil Constitutionnel, il peut être utile de relever que les analyses qui semblent accorder de la pertinence à certains brillants juristes camerounais, quoique le terme de "sophistes" correspondrait plus à leurs prestations scéniques, ne sont que des analyses passionnelles et affectives, puisque tous ces protagonistes, aussi bien les membres du Conseil Constitutionnel que ceux qui plaident leur cause devant ledit Conseil, CAUTIONNENT MORALEMENT L’INAMOVIBILITÉ DES 17 000 CHEFS TRADITIONNELS que compte notre pays, surtout lorsqu’on sait que lesdits chefs deviennent à l’occasion, des acteurs politiques de premier plan. Il faudrait donc peut-être que, nos aînés académiques, qui faut-il le rappeler, ne devraient plus rien avoir à faire dans l’espace public camerounais, arrêtent de se moquer d’eux-mêmes. Achevé et Publié à Soa, le 17 octobre 2018 2 Bureau Central des Recensements et des Études de Population uploads/Geographie/ conseil-constitutionnel-du-cameroun.pdf
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- Publié le Jui 29, 2021
- Catégorie Geography / Geogra...
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