Georges Cœdès Etudes cambodgiennes In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-
Georges Cœdès Etudes cambodgiennes In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 18, 1918. pp. 1-28. Citer ce document / Cite this document : Cœdès Georges. Etudes cambodgiennes. In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 18, 1918. pp. 1-28. doi : 10.3406/befeo.1918.5900 http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/befeo_0336-1519_1918_num_18_1_5900 ÉTUDES CAMBODGIENNES Pat George CŒDÈS, Conservateur de la Bibliothèque Nationale Vajiranâna (Bangkok). XII. — LE SITE PRIMITIF DU TCHEN-LA. Une nouvelle inscription- de Vat Phu publiée récemment par M.^ Finot (BEFEO., XV, », p. 107), nous apprend que le pays (sruk) de Bhadreçvarâspada faisait partie du district (visaya) de Çresthapura ('). Le nom de Bhadreçvara désignant le sanctuaire de Vat Phu (2), il en résulte que le site de Çres.thapura doit être cherché dans cette région, quelque part dans le commissariat de Pak- sé. Cette localisation de. Çresthapura, que les documents publiés antérieu rement n'avaient pas encore permis de préciser (3), a une certaine importance pour l'histoire du Cambodge primitif. Dans l'épigraphie, Çresthapura est la capitale du roi Çresthavarman, fils et successeur de Çrutavarman, la résidence des premiers rois dont la tradition ait gardé. le souvenir. En 757 ç., une inscription de Pràsàt Kôk Pô en parle comme d'une ville sainte (4) ; en 923 ç., Udayâdityavarman I se vante de descendre, par sa mère, de la famille de Çresthapura (5) ; et Jayavarman VII fait remonter ses origines les plus lointaines à Çresthavarman, roi suprême de Çresthapura (6). (1) 1058 çaka ten tvan alo nu vrah Mûlasûtra ta putra sruk Bhadreçvarâspada varnnà karmmântara visaya Çresthapura..., ce 1058 çaka, le ten tvan Lo et Vrah Mûlasûtra son fils, du pays de Bhadreçvarâspada, de la corporation des ouvriers du visaya de Çres thapura... » (2j Aymonier, Cambodge, t. II, p. 163 ; Finot, L'inscription de Ban That, BEFEO., XII, 11. p. 7. (a) Aymonier, Cambodge, t. III, p. 463, place Çresthapura « quelque part dans le Sud- Est du Cambodge »• (*) Inv. Ccedès n°25Ô : ... Çresthapure dharmapûrne dhannena nirmite (cf. J.A., 1909, I. p. 475 n- 1). (5) BEFEO., XI, p. 404. («j. Stèle de Ta Prohm, st. vi-vii (BEFEO., VI, p. 50). XVIII, 9 De plus, c'est à la dynastie de Çresthapura que se rattachent la légende du maharsi Kambu et la tradition généalogique de la race solaire (Sûryavamça) : les rois « qui portent Je fardeau de la terre de Kambu » sont ceux « qui ont Çrutavarman pour racine » ('), etÇresthavarman est comparé à un « soleil dans ce ciel qui .est la famille de çrï Kambu » (2). Çresthapura apparaît ainsi comme le berceau de la première dynastie cam bodgienne. Tout ce que l'on sait de cette dynastie, d'après une brève allusion, de l'inscription de Bàksëi Càmkron, c'est qu'elle eut « la gloire de secouer les- chaînes du tribut » (3). M. Finot suppose que, par ces chaînes, il faut entendre la suzeraineté du Founan (4). Dans cette hypothèse, Çrutavarman etÇresthavarmah seraient les premiers princes du Tchen-la, constituant, au sein du Founan, cet état qui, au VIIe siècle, sous leurs successeurs plus ou moins proches, Citra- sena-Mahendravarman ■ et Bhavavarman I, devait vaincre et absorber l'état suzerain. La localisation de Çresthapura vient confirmer cette hypothèse d'une manière • remarquable. Il y a en effet concordance complète entre : i°les documents chinois qui nous montrent le Tchen-la attaquant le Founan par le Nord (5) ; 2° Tépigraphie de Citrasena, représentée par des inscriptions réparties le long du Grand Fleuve, à Phu Lokhon (6), Thma Krè (7) et Crûoy Ampil (8), — auxquelles on peut ajouter l'inscription de Val Kantél, émanant de son beau-frère (9) — ; et 30 la nouvelle inscription de Vat Phu qui conduit à chercher Çresthapura dans la région de Bassak. Cette région, fut donc le site primitif du Tchen-la, et par- excellence la «terre de .Kambu», dont les premiers souverains furent .Çrutavarman et Çresthavarman (10). Et le kaviqui composa l'inscription de Ban That semble vouloir nous le rappeler, quand il nous dit que. le mont Bhadreçvara, . c'est-à- dire Vat/ Phu, se trouve « ici, dans ce pays.de Kambu », Bhadreçvarâdrâv ihaKambudeçe(l, xxin). (1) Inscription de Bàksëi Càmkrôn, st. xin (J. A., 1909, I, p. 496). (2) Ta Prohm, loc. cit. (3) Bàksëi Càmkron, loc. cit. (*) Sur quelques traditions indochinoises, Mél. Sylv. Lévi, p. 210. (5) Peluot, Le Founan, BEFEO., III, pp. 274, 295. (6) Inv. n° 363, BEFEO., III, p. 442. (1) Inv. n° 122, BEFEO., III, p. 212. (8) Inv". n" 116, BEFEO., IV, p. 739. (9) ISCC, n° IV, p. 28; (10) H en résulte que Tch'e-li-t'o-pa-mo, roi du Founan, n'a rien de commun avec Çresthavarman, roi du Tchen-la à une époque encore indéterminée. M. Pelliot avait déjà montré (BEFEO., III, p. 298) que cette identification proposée par M. Aymonier n'était pas satisfaisante au point de vue phonétique, et préférait lestituer Çrindravar- man comme équivalent du nom chinois." Bhavavarman I, Mahendravarman et leurs successeurs ne font aucune allu sion à ces origines, etparaissent ignorer Çresthapura, Kambu et le Sûryavamça. Ils se rattachent au contraire, comme les rois du Founan, à Kaundinya et à la race lunaire (Somavamça). Ainsi que l'a expliqué M. Finot(1), il leur importait d'assurer leur récente conquête en se faisant passer pour les successeurs légi times des rois qu'ils venaient de supplanter. On peut ajouter que ce furent év idemment les mêmes raisons politiques qui leur firent multiplier les fondations religieuses dans le Sud, c'est-à-dire dans la région où se trouvait le siège de la puissance du Founan ; un simple coup d'œil jeté sur la première Carte de Vempire khmer d'après la situation des inscriptions datées publiée par M. Parmentier, ne laisse aucun doute à cet égard (BEFEO., XVI, m, p. 69). Ces raisons politiques n'existaient plus deux siècles plus tard, lorsque vers 800 A. D.Jayavarman II refit l'unité du Cambodge, morcelé durant le VIIIe siècle. En même temps. qu'il établissait sa résidence au Nord du Grand Lac, loin de l'ancienne capitale du Founan, il se proclamait le roi des Kambujas, des fils de Kambu -et l'héritier du Sûryavamça. L'épigraphie de ce grand roi est malheureusement à peu- près inexistante, mais- c'est durant son règne que le nom Kamhuja est attesté pour la première fois dans une inscription du Campa (2). Jayavarman II apparaît dans l'épigraphie de ses successeurs comme « le-gardien de l'honneur de la race solaire du roi çrï Kambu » (3), comme « le roi des rois des Kambujas » (Kambujarâjendra) (4), et l'une de ses reines nommée Prâna porte le titre significatif de Kambujaràjalaksmî (5). Après lui, l'expression Kambujendra, Kambujeçvara demeura le titre officiel des roisjkhmèrs : Yaçovarman l'affectionnait particulièrement (6), et ce fut lui qui, pendant un certain temps du moins, donna le nom de Kambupurï à la capitale qu'il venait de fonder sur le site actuel d'Ankor Thom (7). En même temps, c'est dû Sûryavamça et- non plus du Somavamça que se réclament régulièrement les successeurs de Jayavarman II (8). Même en supposant que ces traditions généalogiques aient été forgées sous le règne de Jayavarman II, la localisation de Çresthapura ne perd rien de son importance. Elle nous apprend en effet dans quelle région les rois khmèrs du IXe siècle plaçaient le berceau de leur race, la. résidence où leurs ancêtres secouèrent pour la première fois « les chaînes du tribut ». (l) Mél. Sylv. Lévi, pp. 210-211. C2) Pô Nagar, Inv. 31 C 2 — ISCC, n° XXVIII, p. 263. (3) Bàksëi Càmkrôn, st. xix-xx. (4) Pràsàt Kèv, ISCC, n° XV B, st. 11. (5) Prâh Vïhâr, Ibid., n° LXI A, st. v; B/st. ix. (6) Inscriptions digraphiques et stèles du Thnàl Bàrày, passim, 0) Thnâl Bàrày, ISCC, n° LX A, st. xxi. (8) Cf. Finot, Mél. Sylv. Lévi, p. 209. XV11I.9 - XIII. — NOTES SUR TCHEOU TA-KOUAN. Le récit du voyageur Tcheou Ta-kouan qui visita le Cambodge en 1296 contient plusieurs termes khmèrs en transcription chinoise. MM. Aymonier et Firïot en ont identifié un bon nombre dans les notes qu'ils ont ajoutées à la traduction de M. Pelliot (BEFEO., II, p.. 123). Je voudrais compléter sur cer tains points leurs informations et proposer quelques identifications nouvelles. P. 138-139. Tch'a-nan, Fo-ts'ouen, Kan-p'ang. « De l'embouchure, on peut; avec un courant favorable, gagner au Nord, « en une quinzaine, un pays appelé Te h' a-n an. g in est un des gouvernements^ « du Cambodge. A Tch'a-nan, on transborde sur un. bateau plus petit, et, « en dix jours, par, courant favorable, en passant par Pan-tou-ts'ouen « (m. à m. village de la mi-route) et Fo-ts'ouen (m. à m. village du Buddha) ■ « et en traversant la mer d'eau douce, on arrive à Kan-p'ang (l) à 50 li « de la ville. » M. Aymonier (p. 138, n. 9) avait proposé d'identifier Tch'a-nan à Kompoïi Chnàn, mais M. Pelliot semblait préférer Phnom Pén. « II ne faut pas oublier, <( dit-il, que l'on a mis quinze jours pour gagner Tch'a-nan, et qu'il en faut en- « core dix pour atteindre l'entrée de la rivière de Siemrâp ; Kompon Chaan « serait peut-être un uploads/Geographie/ coedes-befeo-1918.pdf
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- Publié le Oct 22, 2022
- Catégorie Geography / Geogra...
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