BIBLIOTHÈQUE INTERNATIONALE D’ÉCONOMIE POLITIQUE publiée sous la direction de A

BIBLIOTHÈQUE INTERNATIONALE D’ÉCONOMIE POLITIQUE publiée sous la direction de Alfred Bonnet PRINCIPES D’ÉCONOMIE POLITIQUE PAR ALFRED MARSHALL PROFESSEUR D’ECONOMIE POLITIQUE A L’UNIVERSITÉ DE CAMBRIDGE TOME PREMIER Traduit par F. SAUVAIRE-JOURDAN Professeur d’économié politique et da science financière à la Faculté de droit de l'Université de Bordeaux Natura non facit sallum. PARIS (5e) V . G I A R D & E . B R I È R E LIBRAIRES—ÉDITEURS 16, RUE SOUPFLOT ET 12, RUE TOULMEEl ^ PRÉFACE DE LA PREMIÈRE ÉDITION Les conditions économiques changent constamment, et chaque génération envisage les problèmes de son temps d’une façon qui lui est propre. En Angleterre, ainsi que sur le Continent et en Amérique, on poursuit à l’heure actuelle les études économiques avec plus d'ardeur que jamais ; mais toute cette activité a sim- plement montré, de la façon la plus claire, que la science écono- mique est, et doit être, d’un développement lent et continu. En considérant l’œuvre de la génération actuelle on pouvait croire, tout d’abord, qu’une partie de ce qu’elle a de meilleur se trou- vait en antagonisme avec l’œuvre des anciens économistes ; mais lorsqu’il se fut écoulé assez de temps pour qù’elle fût mise à sa vraie place, et pour que ses angles brusques aient été émoussés, on s’aperçut qu’elle ne créait pas de véritable so- lution de continuité dans le développement de la science. Les nouvelles théories ont complété les anciennes, elles les ont éten- dues, développées, et parfois corrigées ; elles leur ont donné souvent un autre aspect en insistant d’une façon différente sur les divers points ; mais elles les ont très rarement renversées. Le présent ouvrage est une tentative faite pour présenter dans une forme moderne les vieilles théories, en s’aidant de l'œuvre nouvelle qu’a produite notre époque, et en se référant aux problèmes nouveaux qui s'y posent. Son but général est indi- qué dans le Livre I ; à la fin de ce Livre est donné un bref aperçu des principaux objets des recherches économique, et des principaux résultats pratiques auxquels ces recherches abou- VI PRÉFACE DE LA PREMIÈRE ÉDITION tissent. Conformément aux traditions anglaises, il y est entendu que le rôle la science est de réunir, de grouper et d’analyser les faits économiques et d’utiliser les connaissances, tirées ainsi de l'observation et de l'expérience, pour déterminer ce que doivent être les effets immédiats et les effets postérieurs des divers groupes de causes; il est entendu aussi que les lois économiques expriment des tendances formulées dans le mode indicatif, et non des préceptes éthiques dans 1e mode impé- ratif. Les lois et les raisonnements économiques constituent simplement une partie des matériaux, que la conscience et le sens commun ont à utiliser pour résoudre les problèmes pra- tiques, et pour établir les règles qui peuvent servir de guide dans la vie. Mais les forces éthiques sont au nombre de celles dont les économistes ont à tenir compte. On a bien, il est vrai, fait des efforts pour construire une science abstraite en considérant les actions d’un « homme économique », qui ne serait soumis à au- cune influence éthique, et qui rechercherait son avantage pécu- niaire avec sagesse et énergie, mais mécaniquement et égoïste- ment. Ces efforts n’ont pas réussi ; ils n’ont même pas été poussés complètement, car jamais on n’a considéré l’homme économique comme parfaitement égoïste. Personne ne sait, mieux que l'homme économique, endurer la peine et la privation, dans le but non égoïste de pourvoir aux besoins de sa famille; on a toujours tacitement admis que les motifs qui normalement le guident, comprennent les affections de famille. S’il en est ainsi, pourquoi n’y comprendrait-on pas aussi d’autres motifs al- truistes, dont l’action est assez uniforme dans une même classe, à une même époque, et dans le même lieu, pour qu’on puisse les ramener à une règle générale? Il ne semble pas y avoir de bonne raison pour les exclure. Aussi, dans le présent ouvrage, nous considérons comme action normale celle que l’on peut attendre, dans certaines conditions, des membres d’un groupe industriel ; parmi les motifs dont l’action est régulière, aucun n’a été exclu pour cette raison qu’il serait altruiste. Si l'ouvrage PRÉFACE DE LA PREMIÈRE ÉDITION VII a quelque caractère spécial, on peut peut-être dire qu’il se trouve dans l’importance qui y est donnée à cette application, ainsi qu’à d’autres, du principe de continuité. Il n’y est pas seulement appliqué à la qualité éthique des motifs par lesquels un homme peut être guidé dans le choix des fins qu'il poursuit, mais aussi à la sagacité, à l’énergie et à la hardiesse avec laquelle il les poursuit. C'est ainsi que nous insistons sur le fait qu’il existe une gradation continue depuis les actes d’un homme d’affaires, basés sur des calculs ré- fléchis et d’une portée lointaine et exécutés avec vigueur et habileté, jusqu’à ceux des gens ordinaires qui n’ont ni le pou- voir, ni la volonté, de diriger leurs intérêts à la manière des hommes d’affaires. Avoir une disposition normale à l’épar- gne, une disposition normale à supporter une certaine peine pour une certaine rémunération pécuniaire, ou une aptitude nor- male à chercher les marchés les meilleurs pour acheter et pour vendre, ou à chercher l’occupation la plus avantageuse pour soi-même ou pour un de ses enfants : — toutes ces phrases, et d’autres semblables,ont besoin de se référer aux membres d’une classe particulière de gens dans un lieu et dans un temps donnés. Mais, une fois cela entendu, la théorie de la valeur normale est applicable aux actes de gens vivant en dehors des affaires, tout aussi bien, quoique avec une moindre précision de détail, qu’à ceux du marchand ou du banquier. De même qu’il n’y a pas de ligne bien marquée de division entre une conduite qui est normale et celle qui doit être provi- soirement négligée comme anormale, de même il n’y en a pas non plus entre tes valeurs normales d’une part, et, d’autre part, les valeurs « courantes », ou « de marché », ou « occasion- nelles ». Ces dernières sont les valeurs sur lesquelles les acci- dents du moment exercent une influence prépondérante ; alors que les valeurs normales sont celles qui seraient en définitive réalisées, si les conditions, économiques considérées avaient le temps de produire leur complet effet sans être troublés. Mais il n’y a pas d’abîme infranchissable entre elles ; il y a une gra- VIII PRÉFACE DE LA PREMIÈRE ÉDITION dation continue des unes aux autre. Les valeurs que nous pou- vons regarder comme normales, si nous pensons aux change- ments qui se produisent d’heure en heure dans une bourse des marchandises, sont seulement des valeurs courantes si l’on considère toute une année : et des valeurs qui sont normales lorsqu’on envisage le cours d’une année, ne sont que des valeurs courantes si l’on considère l’histoire d’un siècle. Car l’élément de temps, qui est le centre des principales difficultés de presque tous les problèmes économiques, est lui-même continu : la Nature ne connaît pas de division absolue entre longues périodes de temps et périodes courtes ; mais on passe des unes aux autres par des degrés imperceptibles, et ce qui est une période courte pour un problème, se trouve être une période longue pour un autre. C'est ainsi, par exemple, que la plus grande partie de la dis- tinction, mais non pas, cependant, toute la distinction, entre la rente et l’intérét du capital, repose sur la longueur de la pé- riode que nous avons en vue. Ce qui est légitimement considéré comme un intérêt pour un capital « libre» ou « flottant», ou pour des capitaux nouvellement placés, gagne à être traité comme une sorte de rente — une quasi-rente, dirons-nous ci-dessous — pour des capitaux placés depuis longtemps. De même il n’y a pas de ligne nette de démarcation entre des capitaux flottants et des capitaux qui ont été immobilisés dans une branche par- ticulière de production, ni entre capitaux nouvellement placés et capitaux placés depuis longtemps ; on passe d’un groupe à l’autre graduellement. De même encore la rente du sol ne se présente pas comme une chose distincte par elle-même, mais comme l’espèce principale d’un genre étendu ; quoique elle présente, il est vrai, des particularités propres qui sont, en théorie, comme dans la pratique, d'une importance vitale. De même, quoiqu’il y ait une ligne bien nette de séparation entre l’homme lui-même et les instruments dont il se sert, et quoique l’offre et la demande de travail humain, avec les efforts et les sacrifices que celui-ci exige, offrent des particularités qui PRÉFACE DE LA PREMIÈRE ÉDITION IX leur soient propres et que ne présentent pas l’offre et la demande des biens matériels : néanmoins, après tout, ces biens matériels sont eux-mêmes généralement le résultat du travail de l’homme; la théorie de la valeur du travail, et celle de la valeur des choses faites par lui, ne peuvent pas être séparées : elles sont les parties d’un tout, et, bien que les différences qui existent entre elles pour uploads/Finance/ marshall-principes-d-x27-economie-politique.pdf

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  • Publié le Apv 19, 2021
  • Catégorie Business / Finance
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