Séverine Denis Avoir de la repartie en toutes circonstances © Groupe Eyrolles,

Séverine Denis Avoir de la repartie en toutes circonstances © Groupe Eyrolles, 2009 ISBN : 978-2-212-54225-7 © Groupe Eyrolles 7 Chapitre 1 Vous improvisez tous les jours sans le savoir ! Retour à l’« ici et maintenant » Pourquoi parlons-nous de « retour » à l’ici et maintenant ? Eh bien tout simplement parce qu’il nous faut avant tout nous placer dans le présent. C’est ce que nous appelons l’« ici et maintenant ». L’esprit humain est structuré de telle sorte qu’il est rarement dans le présent, si ce n’est dans ses actions quotidiennes. Mais l’étrangeté fait qu’il y a un déca- lage fréquent entre l’esprit qui vadrouille très vite dans un passé révolu (souvenirs, références, repères) et les actions faites sur le moment. L’esprit a donc souvent un décalage avec l’action, sauf dans certaines circonstances que tout le monde a déjà expérimentées. Par exemple, lorsque nous sommes occupés à une seule action exigeant de la concen- tration. Dans ces moments d’actions demandant une forte attention, l’esprit est uniquement à ce qu’il fait. C’est lorsque nous avons intégré totalement le processus d’un objectif que les attitudes et les gestes machinaux se Avoir de la repartie en toutes circonstances 8 © Groupe Eyrolles mettent en fonction. Et c’est à partir de ce « machinal » que l’esprit libéré de l’attention peut penser à bien d’autres choses en même temps. Ainsi, sans bien en réaliser les conséquences, nous oublions en partie de vivre pleinement le moment présent. Ce n’est pas grave en soi, nous parve- nons très bien à nous en sortir ainsi. Les choses changent lorsqu’il s’agit de revenir dans le présent et seulement dans cet ici et maintenant. Cette atti- tude demande un véritable effort car il nous force à sortir de nos multiples divagations internes pour nous concentrer sur ce qui se passe en temps réel. Cette attitude est fondamen- tale pour notre apprentissage d’une repartie constructive dans toutes nos relations, qu’elles soient privées ou profes- sionnelles. Il nous faut là encore faire une petite distinction. L’art de la repartie peut être de deux ordres : 1. Je réponds du « tac au tac » pour faire rire, pour clouer le bec d’un interlocuteur agaçant ou pour m’affirmer dans une conversation. Dans ces cas, le « tac au tac » s’inscrit dans un échange de jeu inconscient de gagnant/perdant. Alors, la rencontre ne produit pas les mêmes effets. 2. J’ai une repartie constructive, ce qui signifie que je suis en véritable résonance avec mon (ma ou mes) interlocu- teur(trice)(s) et dans ce cas, l’objectif est que la rencontre, si brève soit-elle, est une écoute mutuelle réelle qui enrichit les deux interlocuteurs. Prenons un exemple de la vie courante : Romain arrive à son bureau comme tous les matins, il croise l’hôtesse qui est toujours la même personne depuis qu’il Vous improvisez tous les jours sans le savoir ! © Groupe Eyrolles 9 travaille dans cette grande entreprise, mais, plongé dans ses pensées, un comportement machinal est déjà en fonction : « Bonjour ! lance-t-il à l’hôtesse sans vraiment la regarder. – Oui, ne quittez pas… ! (Elle a un combiné de téléphone coincé sur l’épaule.) Bonjour ! » lance-t-elle à son tour à Romain. Fin de l’échange furtif. Romain s’engouffre dans l’ascenseur et l’hôtesse reprend son interlocuteur au téléphone. Petite scène de la vie courante, mais qui est la métonymie de l’automatisme dans lequel nous vivons au quotidien. Mais, me direz-vous, ça ce n’est pas une rencontre ! Eh bien si, cher lecteur. Un échange, même bref, peut être une rencontre entre deux personnes et non pas deux courts monologues qui ne se rencontrent pas. Romain peut agir exactement dans le même temps, c’est-à-dire rapidement en se dirigeant vers l’ascenseur, et accorder à l’hôtesse quelques vrais instants d’attention. C’est l’étonnement que l’on a souvent entendu de la part des spectateurs des matchs ou des spectacles d’improvisation : « Mais comment faites-vous pour que les répliques se répondent aussi vite tout en construisant une vraie histoire ? » L’écoute commence là et il est fondamental de saisir ce phénomène, ne serait-ce que pour déjà en devenir conscient. Ceux qui disent ne pas avoir le temps se trompent. Même dans un monde qui va de plus en plus vite, la repartie attentionnée est particulièrement utile et nous allons voir pourquoi et comment. Avoir de la repartie en toutes circonstances 10 © Groupe Eyrolles À retenir ! La repartie se produit dans l’ici et maintenant en accordant une vraie attention à l’autre. À vous de jouer ! 1. Choisissez une situation de votre vie quotidienne dans laquelle votre interlocuteur(trice) est une personne que vous rencontrez régulièrement mais d’une façon brève (un commerçant de votre quartier ou tout autre interlocuteur de la vie extérieure). 2. Efforcez-vous de sortir des formules machinales et accordez d’abord une vraie attention quelques instants avant de parler ou de répondre. 3. Prenez conscience de ce que vous percevez chez votre interlocuteur(trice) : impatience ? fatigue ? tension ? déta- chement ? 4. Rétorquez en tenant compte de ce que l’autre émet et de votre état interne. Veillez à ne pas intellectualiser. Laissez-vous simplement traverser par ce que vous ressentez pour répondre. Faites ce genre de petits entraînements dès que vous y pensez au cours de vos journées. Ces premières petites attentions ont pour conséquences de stimuler à nouveau en vous la capacité à capter les états des autres et d’y répondre d’une façon plus adaptée. Il n’y a pas de bonnes reparties ni de bonnes réponses constructives sans cette capacité à Vous improvisez tous les jours sans le savoir ! © Groupe Eyrolles 11 écouter l’autre au-delà des mots. C’est à vous de choisir les circonstances ou situations que vous considérez plus propices à ce genre d’entraînement. Ce réflexe doit devenir naturel. Si vous sentez que c’est contraignant, ne faites rien et continuez votre vie. L’idéal étant que ce petit exercice devienne tout simplement un jeu pour vous. Comment ça marche ? Les trois piliers fondamentaux : être conscient ; lâcher prise ; vigilance émotionnelle. Ouvrons quelques minutes le capot pour comprendre, d’une part, ce qui se met en fonction en agissant ainsi et, d’autre part, la loi des conséquences énergétiques. 1 er pilier : être conscient Plus haut, nous faisions la différence entre le « tac au tac » et la repartie constructive. Prenons un exemple relevé dans les anecdotes de la vie d’une personnalité politique. Lors de l’enregistrement de l’émission de Michel Drucker, Vivement dimanche , l’imitateur vedette Nicolas Canteloup échange avec la ministre Roselyne Bachelot. Extrait choisi de ce court échange : Nicolas Canteloup : « J’ai réussi à imiter votre voix quand j’ai entendu une vieille porte grincer chez moi ! » Roselyne Bachelot : « Heureusement que ce n’était pas en entendant votre lavabo se vider 1 !? » 1. Le Parisien du 21 mars 2007. Avoir de la repartie en toutes circonstances 12 © Groupe Eyrolles Dans un tel échange, il n’est pas difficile de comprendre que nous ne sommes pas dans un échange constructif, mais dans une recherche affichée de provoquer. Et, sans se démonter, la ministre répond sans hésiter, du « tac au tac ». Nous pouvons reconnaître à la ministre une réelle capacité à avoir de la repartie. Il s’agit ici d’une dynamique particulière entre deux individus qui, bien que très différents, partagent l’un et l’autre une habitude certaine de l’exposition publique. L’un comme l’autre est entraîné à la maîtrise de l’environnement médiatique, d’un côté par le métier de la scène et de l’autre par l’apprentissage de la communication politique. Dans ce type d’échange, le résultat est l’effet immédiat d’un jeu de ping-pong sans recherche particulière autre que l’effet en question. On est entraîné à la réplique ou on ne l’est pas et on perd ses moyens. Pourtant, à y bien regarder, hors des plateaux, où c’est la fantaisie qui prime, on peut remarquer que, la majeure partie du temps, les personnalités interrogées, quel que soit leur champ de compétence, écoutent jusqu’au bout avec attention puis répondent point par point. Nous excluons, bien entendu, les grands débats sur des sujets passionnés et brûlants où il n’est pas rare que la controverse tourne à l’affrontement. Et c’est précisément dès qu’un échange se transforme en compétition pour avoir raison de l’autre que les échanges deviennent stériles. En pratiquant le petit exercice proposé plus haut, vous aurez sans doute remarqué l’omniprésence des émotions qui nous traversent selon les situations. La situation courante de Romain est très peu chargée en émotion alors que celle de Roselyne Bachelot l’est davantage. C’est pour- Vous improvisez tous les jours sans le savoir ! © Groupe Eyrolles 13 quoi il est important d’apprendre à localiser en soi l’émotion qui nous traverse. La plupart des personnes qui se plai- gnent de ne pas avoir suffisamment de repartie sont souvent débordées par l’émotion (malaise, vexation, désta- bilisation, stupéfaction) de l’instant et perdent leurs moyens de réplique. Devenir conscient de ce qui se passe en soi est, avec l’écoute, l’un uploads/Finance/ improvisation-avoir-de-la-repartie.pdf

  • 55
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Jan 27, 2021
  • Catégorie Business / Finance
  • Langue French
  • Taille du fichier 0.2263MB