1 CAPAVOCAT CORRECTION DU GALOP DE PROCEDURE CIVILE N° 5 DU LUNDI 30 AOUT 2010

1 CAPAVOCAT CORRECTION DU GALOP DE PROCEDURE CIVILE N° 5 DU LUNDI 30 AOUT 2010 SUJET N° 1 : Commentaire de l’article 526 du CPC La nouvelle rédaction de l'article 526 du Code de procédure civile, issue du décret du 28 décembre 2005, est appelée à avoir des conséquences pratiques redoutables. En substance, cet article prévoit que le premier président ou le conseiller de la mise en état peut, à la demande de l’intimé, radier du rôle l’affaire lorsque l’appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d’appel, sauf s’il lui apparaît que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l'appelant est dans l'impossibilité d'exécuter la décision. La réinscription n’est alors possible qu’en cas d’exécution de la décision et si la péremption n’est pas acquise. Cet article, qui prend place dans les dispositions communes à toutes les juridictions (Livre premier) dans le Chapitre IV du Titre XV relatif à l’exécution provisoire des jugements et dans le chapitre III du Titre XI relatif aux cause de suspension de l’instance. Cela s’explique par le fait que l’article 526 CPC était voulu par le pouvoir réglementaire pour renforcer l’effectivité de l’exécution provisoire des décisions de justice. En effet, il était très courant qu’une partie condamnée en première instance n’exécute pas la décision et fasse un appel dilatoire. Soucieux de désengorger les juridictions, notamment d’appel, le pouvoir réglementaire a alors repris la proposition du rapport Magendie de transposer les dispositions des articles 1009-1 à 3 du Code de procédure civile déjà en vigueur devant la Cour de cassation depuis 1999. Il reste que, au niveau de l’appel, la menace d'une éventuelle radiation est autrement plus grave que devant la Cour de cassation, si l'on considère qu'un premier juge peut ordonner l'exécution provisoire toutes les fois qu'il « l'estime nécessaire », sans la moindre motivation (CPC, art. 515, al. 1). D’autant que l'appel dont le débiteur risque d'être privé, en raison de la péremption de l’instance, est une voie de recours ordinaire qui, à la différence du pourvoi en cassation, remet la chose jugée en question, aussi bien en fait qu'en droit. Finalement, c'est bien le double degré de juridiction qui est atteint. Il apparaît alors que les juges du fond devront appliquer l’article 526 du Code de procédure civile avec beaucoup de prudence. Sa mise en œuvre semble ainsi difficile (I) en raison de ses effets qui sont contestables (II). I. Une mesure difficile à mettre en œuvre La mise en œuvre de l’article 526 du Code de procédure civile ne va pas sans poser de difficulté quant à la compétence du juge qui peut la prononcer (A) et quant à ses conditions d’application (B). A. Les difficultés liées à la compétence du juge L’article 526 du Code de procédure civile prévoit que « Lorsque l'exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le premier président ou, dès qu'il est saisi, le conseiller de la mise en état peut (…) décider (…) la radiation du rôle de l'affaire ». De fait, la compétence relève soit du premier président de la cour d'appel, soit du conseiller de la mise en état. La question est alors de savoir quel juge les parties doivent saisir. Il apparaît clairement le pouvoir réglementaire avait à l’esprit, pour déterminer la compétence, les différents types de procédure. Ainsi, le premier président est seul compétent pour prononcer la radiation lorsque la procédure est sans représentation obligatoire, ou lorsqu'il n'y a pas de conseiller de la mise en état saisi (c'est-à-dire dans l'hypothèse d'un jour fixe). Il faut en déduire que le juge chargé de suivre l’instruction (dans les procédures sans représentation obligatoire) n’est pas compétent (Rennes, 3 mai 2007). Dans les autres cas, le conseiller de la mise en état devra statuer (Ph. Gerbay). 2 Pour autant, le pouvoir réglementaire n’avait semble-t-il pas pensé à l’hypothèse dans laquelle le conseiller de la mise en état n’est pas saisi immédiatement. A-t-on alors le choix entre le premier président et le conseiller de la mise en état ? L’emploi, dans l’article 526 du Code de procédure civile, du verbe pouvoir laisse penser que la compétence du premier président est alternative avec celle du conseiller de la mise en état. Une telle alternance de compétence serait générateur de confusion et donc d’insécurité juridique. Il faut donc approuver le premier président de la cour d'appel d’Aix-en-provence qui a décidé dans une ordonnance de référé du 6 décembre 2006 que la compétence conférée par l’article 526 du Code de procédure civile au premier président et au conseiller de la mise en état est successive et non alternative (Aix-en-provence, ord. réf., 6 décembre 2006, Giudice). Ainsi, le premier président n'est donc plus compétent dès que le conseiller de la mise en état est saisi. Le premier président ajoute dans son ordonnance qu’à défaut de désignation expresse, le conseiller de la mise en état est réputé être saisi dès la mise au rôle de l'affaire. Enfin, le conseiller de la mise en état reste compétent quand bien même le premier président a été saisi antérieurement sur le fondement de l’article 524 du Code de procédure civile, et ce malgré le risque de contrariété de décision (Aix-en-provence, ord. réf., 6 décembre 2006, Warrick). Le premier président, dans son ordonnance, semble regretter ce risque de contrariété de décision, mais rappelle à juste titre qu’il relève du ressort du pouvoir réglementaire, et non du sien, de modifier les articles du Code de procédure civile qui risquent d’entraîner de telles conséquences. B. Les difficultés liées aux conditions de mise en œuvre La radiation de l’article 526 du Code de procédure civile ne peut être prononcé d’office. Le texte précise très clairement qu’elle doit être demandée. Ceci ne fait pas de difficulté particulière. En revanche, un premier problème d’application de l’article 526 du Code de procédure civile est relatif à la sémantique. En effet, le décret du 28 décembre 1998 a fait la distinction entre la radiation et le retrait du rôle (articles 381, 382 et 388) : la radiation sanctionne le défaut de diligence des parties alors que le retrait du rôle est ordonné lorsque toutes les parties en font la demande. Le défaut de diligence visé à l'article 381 est indiscutablement un défaut de diligence procédurale (l'article 381 est inséré dans une Section 2, Chapitre 3 du Titre XI du Code de procédure civile, lequel régit les incidents d'instance). Ainsi, le défaut de diligence ne devrait être qu'un défaut de diligence lié à l'instance et nullement un défaut de diligence lié à l'exécution de la décision. Cette ambiguïté n'est pas sans conséquence, comme nous le verrons, sur l'existence d'une éventuelle péremption ou tout simplement sur les conditions d'une remise au rôle. Ensuite, l’article 526 du Code de procédure civile ne prévoit pas les hypothèses particulières de la pluralité des intimés, dont la situation peut être différente, ni celle de la pluralité des appelants, ce qui est plus gênant encore. En effet, le magistrat devra-t-il refuser la radiation dès lors que l’exécution de la décision est impossible ou entraîne des conséquences manifestement excessives à l’encontre de tous les appelants ou seulement l’un d’eux ? Une autre difficulté porte sur le délai pour demander la radiation du rôle devant la cour d’appel. On sait que devant la Cour de cassation, la radiation doit être demandée dans un délai de 2 mois (depuis le décret du 22 mai 2008 ; art. 1009-1 et 982 CPC). A l’inverse, l’article 526 CPC ne prévoit aucun délai, et le décret du 9 décembre 2009 qui réforme la procédure d’appel à compter du 1er janvier 2011 ne prévoit rien non plus. On peut toutefois penser que le nouvel article 909 CPC qui impose un délai de deux mois à l’intimé pour déposer ses conclusions s’appliquera également pour invoquer la radiation. Enfin, la notion de conséquences manifestement excessives qui vient d’être évoqué est une notion quelque peu fuyante qui nécessite une interprétation jurisprudentielle. Elle devrait se distinguer du second fait justificatif, tiré de la jurisprudence (CEDH, 14 décembre 2000) rendue en application de l’article 1009-1 CPC : l’impossibilité d’exécuter. En effet, les conséquences seront manifestement excessives lorsque l’exécution de la décision crée ou aggrave la situation de précarité de l’intéressé. L’impossibilité d’exécuter, quant à elle, peut être juridique ou personnelle. Elle est par exemple juridique lorsqu’elle résulte d’une procédure collective postérieure à la 3 condamnation (Cass., ord. 1er prés., 15 janv. 1997). Lorsqu’elle est personnelle, la notion se rapproche des conséquences manifestement excessives. Pour la distinguer, il faut admettre que la précarité de l’intéressé est déjà telle que tout paiement des causes de la condamnation est exclu. Toujours est-il que les juges du fond devront manipuler ces notions avec précaution, et ne pas avoir de vue trop restrictive sous peine de porter atteinte au double degré de juridiction, ce que la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ne regarderait pas d’un bon œil. II. Une mesure aux effets contestables L’article 526 du Code de procédure civile a certes la vertu de uploads/S4/ proc-civile-dst-5-corriges.pdf

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  • Publié le Sep 30, 2021
  • Catégorie Law / Droit
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