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Tous droits réservés © Université du Québec à Montréal, 2002 This document is protected by copyright law. Use of the services of Érudit (including reproduction) is subject to its terms and conditions, which can be viewed online. https://apropos.erudit.org/en/users/policy-on-use/ This article is disseminated and preserved by Érudit. Érudit is a non-profit inter-university consortium of the Université de Montréal, Université Laval, and the Université du Québec à Montréal. Its mission is to promote and disseminate research. https://www.erudit.org/en/ Document generated on 04/17/2022 8:49 a.m. Frontières L’ adultère et la peine de mort par lapidation dans l’ islam Jean-Jacques Lavoie La mort prononcée Volume 14, Number 2, Spring 2002 URI: https://id.erudit.org/iderudit/1073971ar DOI: https://doi.org/10.7202/1073971ar See table of contents Publisher(s) Université du Québec à Montréal ISSN 1180-3479 (print) 1916-0976 (digital) Explore this journal Cite this article Lavoie, J.-J. (2002). L’adultère et la peine de mort par lapidation dans l’islam. Frontières, 14(2), 49–54. https://doi.org/10.7202/1073971ar Article abstract The goal of this article is to trace in Islam’s criminel law the base texts that sentence those, most often women, accused of adultery (zinâ’, a term denoting illicit sexual activity in the most general sense) to stoning; to examine the origin of such criminal law; to describe its transformation and its impact on government legislation of some Islamic countries; and to offer a general framework for reflection on how this method of execution foreshadows death. 49 FRONTIÈRES ⁄ PRINTEMPS 2002 R E C H E R C H E L’ADULTÈRE ET LA PEINE DE MORT PAR LAPIDATION DANS L’ISLAM « LE MEURTRE FAIT PARTIE DES ROUTINES SOCIALES ET DES GRANDES MISES EN SCÈNE, RELIGIEUSES ET POLITIQUES, QUI PORTENT L’HISTOIRE DU GENRE HUMAIN JUSQU’À NOUS. » (LEGENDRE, 2000, p. 31) Résumé L’objectif de cet article est de retracer dans le droit pénal de l’islam les textes fondateurs qui condamnent à la lapida- tion les personnes (le plus souvent des femmes) accusées d’adultère (zinâ’, terme qui désigne plus vaguement l’acte sexuel illicite), d’examiner l’origine de ce droit pénal, de décrire sa transformation et son impact dans la législation d’État de quel- ques pays musulmans et d’offrir une struc- ture générale de réflexion sur la façon dont ce mode d’exécution annonce la mort. Mots clés : lapidation – islam – Shari‘a – adultère Abstract The goal of this article is to trace in Islam’s criminel law the base texts that sentence those, most often women, accused of adultery (zinâ’, a term denoting illicit sexual activity in the most general sense) to stoning ; to examine the origin of such criminal law ; to describe its transfor- mation and its impact on government legislation of some Islamic countries ; and to offer a general framework for reflec- tion on how this method of execution foreshadows death. Key words : storting – Islam - Shari‘a – adultery Anonyme, Feuille à calligraphie d’or sur feuille de tabac. D.Khalili Collection of Islamic Art, Londres FRONTIÈRES ⁄ PRINTEMPS 2002 50 résulte que l’homme, contrairement à la femme, n’est pas tenu au devoir de fidélité. L’homme marié peut donc facilement se protéger de l’accusation de zinâ’ et de ses sanctions. Cette protection est d’autant plus grande qu’il peut facilement divorcer. Mieux encore, l’islam shi‘îte, sur la base de la sou- rate 4,24, reconnaît même à l’homme, et à l’homme seul, le droit de contracter autant de mariages temporaires (mut’a/sigheh) simultanés qu’il le désire. Il peut cesser le contrat quand il veut, sans aucun consen- tement de la femme. En bref, l’interdiction de l’adultère est un corollaire au statut de la femme mariée, voire une définition de ce statut. Deuxièmement, cette définition juri- dique du zinâ’ est tenue du point de vue masculin et réifie la femme. D’une part, en spécifiant que l’acte doit être accompli volontairement, le juriste entend distinguer la relation consentie du viol. Or, il va de soi qu’un homme ne peut invoquer comme excuse la contrainte. D’autre part, la femme n’intervient que comme objet3. En résumé, dans la réalité, l’adultère s’entend donc le plus souvent des rapports sexuels volon- taires impliquant une femme mariée et un autre homme que son mari. Cette concep- tion de l’adultère fait ressortir l’aspect féminin de la faute, qui est surtout répré- hensible quand il s’agit de l’épouse, consi- dérée comme la responsable principale de la transgression. C’est ce qu’illustre claire- ment, on le verra, le fait que ce sont très majoritairement des femmes qui ont été et qui sont encore sujets des sanctions pré- tendues divines. Même la littérature atteste ce fait. Par exemple, l’adultère féminin est un thème fréquent des Mille et une nuits, lesquelles sont bâties sur la constatation par les deux frères, les rois de l’Inde Chahriâr et Chahzenân, de l’adultère de leurs deux épouses-reines. Cette conception machiste de l’adultère, qu’on retrouve quasi systématiquement chez les juristes musulmans (Benkheira, 1997 , p. 283-342), est assurément déplo- rable, mais à ce stade il me faut rappeler que le statut juridique n’a pas toujours et partout reflété une réalité sociale de fait. En outre, cette définition machiste n’est pas l’apanage des lois musulmanes. Par exemple, jusqu’à la réforme du 11 juillet 1975, les articles 337-338 du Code pénal français stipulaient que l’adultère était un délit opposable à l’épouse seule, l’amant étant tenu pour complice et non coauteur de l’infraction! Pire encore, l’article 324 de ce Code pénal excusait même le meurtre commis par un conjoint sur son épouse sur- prise en flagrant délit d’adultère au domi- cile conjugal. Quant à l’époux volage, le Code français ne prévoyait à son encontre qu’une peine d’amende (Alemany, 2000, usage dans les différents groupes ethno- culturels. En effet, l’histoire de l’islam montre que les États musulmans n’ont jamais réussi à complètement substituer la Shari‘a aux droits coutumiers locaux, notamment pour tout ce qui concerne les conduites sexuelles qui engagent l’honneur des pères et des maris. Il n’est toutefois pas étonnant que les droits coutumiers aient toujours triomphé, puisque le Coran a lui- même imposé comme normes absolues et universelles certaines dispositions du ‘Urf bédouin de l’Arabie ancienne, surtout en matière pénale. Dans la deuxième partie de l’article, je mènerai une enquête en amont de la Shari‘a de façon à retracer l’origine de la lapidation appliquée par le droit pénal musulman en matière d’adultère. Pour ce faire, je présen- terai de façon succincte et diachronique les principales lois de l’Antiquité proche- orientale relatives à l’adultère, du Code de Hammurapi (XVIIIe siècle avant notre ère) jusqu’aux textes du Talmud (entre le IIe et le Ve siècle de notre ère). Dans la troisième partie de l’article, je poursuivrai l’investigation en aval du Coran et de la Sunna2. Mais comme l’islam n’a jamais été un bloc monolithique et que l’application des lois relatives à l’adultère a varié selon les époques, les pays et les dif- férentes tendances religieuses, je n’abor- derai que très rapidement la situation actuelle de la lapidation dans quelques pays où la Shari‘a est la loi d’État. Mon atten- tion portera plus particulièrement sur la république islamique d’Iran, pays où règne l’islam shi‘îte. L’ADULTÈRE On ne pourrait bien définir ce qu’est l’adultère dans l’islam sans comprendre le concept de zinâ’. Or, pour savoir ce que signifie ce mot, je partirai de la définition de Khâlîl b. Ishâq (m. 776/1374), juriste mâlikite renommé, particulièrement au Maghreb: «Le zinâ est le coït d’un Musul- man pubère et sain d’esprit, réalisé au moyen des parties génitales d’un être humain sur lesquelles il n’a pas les droits d’un mari ou d’un maître […] et accompli volontairement, non par oubli, erreur ou ignorance» (Ben Ish’âq, 1962, p. 47). Au sujet de cette définition viriarcale du zinâ’, où chaque mot a son importance, je ne ferai que deux remarques. Premièrement, pour qu’il y ait zinâ’, il suffit qu’il y ait coït entre un homme et une femme non liés légalement. Par ailleurs, comme les lois musulmanes reflètent l’orientation des sociétés polygames où seul l’homme marié peut licitement avoir des relations avec un maximum de quatre épouses (Coran 4,3) et avec un nombre illimité de concubines (Coran 4,25; 23,6; 33,50.55; 70,30), il en Jean-Jacques Lavoie, Ph.D., professeur, Département des sciences religieuses, UQÀM. La question de la violence est la ques- tion du commencement: on le sait depuis qu’il existe des personnes et qu’elles se que- rellent pour décider «qui a commencé?». Au commencement était la violence. La première personne qui meurt dans la Bible est tuée par son frère (Genèse 4,8). Depuis toujours, le meurtre hante l’esprit de l’être humain. Parmi les nombreux noms de baptême que le meurtre a reçus au cours de l’histoire (empoisonnement, étrangle- ment, etc.), il y en a un qui résonne à nos oreilles comme un mot d’un autre âge: la lapidation. L’objectif de cet article est de retracer dans le droit pénal de l’islam les textes fon- dateurs qui réservent ce procédé de mise à mort aux personnes accusées d’adultère (zinâ’, terme qui désigne plus vaguement l’acte sexuel illicite), d’examiner l’origine de ce droit pénal et de décrire sa transfor- mation et son impact dans la législation d’État de quelques pays musulmans. Dans la première uploads/S4/ l-x27-adultere-et-la-peine-de-mort-par-lapidation-dans-l-x27-islam-jean-jacques-lavoie.pdf
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Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Dec 06, 2021
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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