Association professionnelle pour l’éducation sociale et la pédagogie spécialisé
Association professionnelle pour l’éducation sociale et la pédagogie spécialisée Fachverband Sozial- und Sonderpädagogik Octobre 2015 A R T I C L E D E T Ê T E Le droit à la promotion jeune âge. Plus tard … c’est souvent trop tard. L’enfant en situation de handicap demande à rejoindre des enfants du quar- tier ou de l’école, comme il peut le faire, parce qu’il sait qu’il peut passer d’un espace à l’autre en toute confiance, celui des non-handicapés à celui des handicapés et vice-versa. Dans l’idéal, passer de l’un à l’autre, être bien dans l’un et l’autre, selon les circonstances, c’est avoir la certitude qu’aucun des deux espaces n’est fermé et qu’il peut choisir lui-même, et faire ainsi partie de la société de plein droit. Dans ce sens, tout système éducatif doit promou- voir les enfants en situation de handicap sans inclure artificiellement. En tout état de cause, ce droit ne pourra être possible dans une vie d’adulte que si la personne en situation de handicap a pu bénéficier, du- rant son enfance, d’un lieu de socialisation ordinaire généralement avant l’âge des performances (en général celui des appren- tissages scolaires) et qu’elle a pu rejoindre un milieu adapté en grandissant si le besoin s’en est fait sentir. Les passerelles psychiques se fabriquent grâce aux expériences sensées et bien vécues en milieu ordinaire comme en milieu spécialisé. Elles sont le gage d’une pro motion réussie de chaque enfant en situation de handicap. Agir parmi les autres, parfois simplement en étant présent et visible, c’est d’abord le droit à la promotion pour chaque enfant. Cédric Blanc Membre du Comité central Integras Les textes internationaux visant la protec- tion et la promotion des droits des enfants en situation de handicap invitent les diri- geants politiques, les professionnels et l’ensemble des citoyens, à respecter l’inté- rêt supérieur de l’enfant. La question centrale abordée dans ce numéro est simple: comment favoriser la participation sociale d’un être trop souvent invisible dans la société? Et si la vision inclusive de notre société ne reflétait pas intégralement l’intérêt supérieur des enfants concernés? Comment se représentent-ils les milieux sociaux et éducatifs qui les accueillent? Y a-t-il à leurs yeux indubitablement un milieu plus favo- rable que l’autre, ordinaire ou spécialisé? Un constat: l’enfant aspire avant tout à être entendu et considéré. Peu importe le milieu. Au-delà des mesures de protection évo lutives, parfois indispensables à la construction du bien-être d’un enfant en situation de handicap, le milieu accueillant doit lui permettre d’agir, d’être visible. Pour l’enfant, la possibilité de participer se différencie de sa protection dans la mesure où il devient acteur. Il sera deman- deur si l’environnement social et éducatif s’adapte à lui et le sollicite dans sa capa cité à exprimer ses intérêts, ses souhaits et ses rêves en termes de besoins. Pour l’enfant, il est ainsi fondamental d’instaurer des passerelles entre milieux «ordinaires» et milieux «spécialisés», par des expériences sociales concrètes et précoces. Ces passerelles d’un espace à un autre ne peuvent se mettre en place qu’à condition qu’elles se soudent dès le plus La Suisse face à ses obligations inter nationales: il y a encore du travail … La protection et la promotion des droits des enfants handicapés constitue toujours un défi, y compris en Suisse: comment tenir compte des spécificités et des besoins de chaque enfant, comment garantir l’application des droits fonda- mentaux tels que la participation ou la non- discrimination, comment intégrer les «nouvelles écoles de pensées» dans les systèmes et struc- tures existantes? Ces questions soulèvent une multitude de problèmes, et il serait naïf de rechercher la panacée à tout prix. Malgré des efforts importants engagés par les acteurs nationaux et cantonaux, en particulier à travers les réformes législatives (Loi fédérale sur l’élimination des inégalités frappant les per- sonnes handicapées, Loi fédérale sur les insti tutions destinées à promouvoir l’intégration des personnes invalides), et l’engagement quotidien des professionnels auprès des enfants, beaucoup reste à faire pour améliorer encore la mise en œuvre effective de leurs droits. Comme le relève le Comité des Droits de l’Enfant «les organes conventionnels offrent un énorme potentiel pour la promotion des droits des per- sonnes handicapées, mais ils sont généralement sous utilisés. Lorsqu’elle a été adoptée, en no- vembre 1989, la Convention relative aux droits de l’enfant était le premier instrument relatif aux droits de l’homme à faire explicitement référence au handicap (art. 2 sur la non discrimi- nation) et à consacrer entièrement un article (l’article 23) aux droits et aux besoins des enfants handicapés»1. Mais, comme le souligne J. Zermatten: «ces deux articles ne doivent surtout pas occulter que toute la Convention est applicable à ces enfants, donc que ceux-ci ont droit à leurs droits, au autrement dit que les Etats doivent faire reconnaître, respecter et appliquer tous les droits des enfants disposant de capacités différentes»2. En mai 2008, la Convention sur les droits des personnes handicapées a été adoptée. Elle compte plus de 150 Etats ratifiant, dont la Suisse où elle est entrée en vigueur le 15 mai 20143. En vertu du paragraphe 2 de l’article premier de la Convention, «par personnes handicapées on entend des personnes qui présentent des in capacités physiques, mentales, intellectuelles ou sensorielles durables dont l’interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l’égalité avec les autres». La Suisse n’a pas encore soumis de rapport au Comité sur les droits des personnes handica- pées, mais en janvier 2015, elle a été entendue par le Comité des droits de l’enfant dans le cadre de la procédure habituelle de surveillance de la mise en œuvre des droits de l’enfant. Dans ses conclusions, le Comité publie ses «Obser vations finales» qui soulignent que «l’invisibilité des enfants handicapés est un des facteurs premiers de la violation de leurs droits». Si le Comité s’est félicité de l’entrée en vigueur de la loi fédérale sur l’élimination des inégalités frappant les personnes handicapées et de l’adoption de l’accord intercantonal sur la colla- boration dans le domaine de la pédagogie spécialisée, il s’est toutefois dit préoccupé par les points suivants: a) L’absence de données détaillées sur les enfants handicapés, y compris les enfants souffrant de troubles du spectre autistique; b) L’inclusion insuffisante de ces enfants dans le système éducatif ordinaire dans tous les cantons, et le manque de ressources humaines et financières allouées en vue d’assurer le fonctionnement adéquat d’un système éduca- tif inclusif dans la pratique. c) Le manque de structures d’éducation et de prise en charge de la petite enfance et de pos- sibilités de formation professionnelle inclusive pour les enfants handicapés; d) La discrimination et la ségrégation dont font l’objet les enfants souffrant de troubles du spectre autistique, (…) f) Le manque d’informations sur les mesures qui sont prises pour prévenir le placement d’enfants handicapés dans des services psy- chiatriques et pour que ces enfants ne soient pas arbitrairement privés de leur droit de recevoir la visite de leurs parents. Le Comité a, en conséquent, fait les recomman- dations suivantes: a) De procéder au recueil et à l’analyse de données sur la situation de tous les enfants handicapés, ventilées notamment par âge, sexe, type de handicap, origine ethnique et nationale, zone géographique et milieu socioéconomique; b) D’intensifier ses efforts pour établir un sys- tème éducatif inclusif, dans l’ensemble de l’État partie, sans discrimination, notamment en allouant les ressources nécessaires, en assurant une formation adéquate aux profes- sionnels et en fournissant des orientations claires aux cantons qui continuent d’appliquer une approche ségrégative; c) De promouvoir l’inclusion de préférence à l’intégration; d) De veiller à ce que les enfants handicapés aient accès aux services d’éducation et de prise en charge de la petite enfance, à des programmes de développement précoce et à des possibilités de formation profes sionnelle inclusive dans tous les cantons; e) De répondre aux besoins spécifiques des enfants atteints de troubles du spectre autis- tique dans tous les cantons et, en particulier, de veiller à ce qu’ils soient pleinement inté- grés dans tous les domaines de la vie sociale, y compris les activités récréatives et cultu- relles, de faire en sorte que la priorité soit donnée à une éducation inclusive adaptée à leurs besoins et non à une éducation ou à des services de garde spécialisés, de mettre en place des mécanismes de détection précoce, d’assurer la formation adéquate des profes- sionnels et de veiller à ce que ces enfants bénéficient effectivement de programmes de développement précoce fondés sur des connaissances scientifiques; (…) g) De prendre toutes les mesures voulues pour éviter que les enfants handicapés soient placés dans des services psychiatriques et de veiller à ce que ces enfants ne soient pas privés arbitrairement du droit de recevoir la visite de leurs parents». Malgré sa situation socio-économique privilé- giée, la Suisse doit donc faire mieux en matière de protection des enfants handicapés. Mais n’oublions pas que les recommandations onu- siennes s’adressent à l’ensemble des acteurs concernés par ces questions; les initiatives visant à rapprocher les cantons, échanger sur des thématiques communes, uploads/S4/ integras-thema-frz-okt-2015.pdf
Documents similaires










-
38
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Aoû 04, 2021
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
- Taille du fichier 0.4267MB