Dissertation : « L’animal en droit des biens » : « Définir les animaux par leur

Dissertation : « L’animal en droit des biens » : « Définir les animaux par leur sensibilité, afin de les distinguer des biens ou des choses, et continuer de les soumettre à leur régime, est une contradiction. » (J-P Marguénaud ; Recueil Dalloz 2020 p. 28). Cette citation vient appuyer l’engouement dont s’est prise la doctrine depuis quelques années sur la question du statut juridique de l’animal. Depuis que l’être humain est doté d’une conscience de lui-même, il n’a cessé de vouloir s’émanciper du statut animal, surtout depuis qu’il a acquis une certaine religiosité. Si la religion, les mœurs, la philosophie ont largement étudié la question de l’animal, la discipline juridique semble s’y être intéressée que récemment historiquement parlant. Ce n’est en effet, qu’au XIXe siècle que l’animal sera invoqué qu’indirectement par des dispositions législatives. C’est d’ailleurs par la qualification de l’animal par le Code civil de 1804 que la doctrine et les milieux associatifs vont s’insurger pour dénoncer une qualification de l’animal que trop archaïque. En effet, jusqu’en 2015, l’animal était considéré par le Code civil comme un meuble par nature. Il est n’est donc pas surprenant que les lunettes du XXIe siècle considèrent que la qualification de l’animal en chose est complètement dépassée. Le régime juridique des biens est, il est vrai, assez vaste et contient des objets de droit complètement surprenants. Mais c’est sous l’impulsion de l’évolution des sujets sociétaux que la question de la requalification juridique de l’animal va venir au fur et à mesure, s’infuser dans les mentalités et parvenir jusqu’au législateur. En effet, c’est d’abord par l’intermédiaire du Code rural et de la pêche maritime que la question de l’animal va être redéfinie, et sera qualifiée pour la première fois en France d’être sensible. Ensuite, le Code pénal suivra le mouvement en sanctionnant la maltraitance animale et en encadrant les expériences scientifiques ; ce qui aura pour conséquence d’extirper l’animal de sa catégorie de bien meuble. Néanmoins, le Code civil ne bougera pas jusqu’en 2015, où le législateur, surtout poussé par les associations de protection de l’animal, requalifiera l’animal avec une extrême précaution. En effet, le législateur va opérer une modification des termes utilisés pour la qualification de l’animal, passant de bien meuble à un être vivant doté de sensibilité. Pourtant, celui-ci reste dans la section du Code civil consacrée aux biens. La modification ne s’avèrera donc pas substantielle. L’intérêt de la qualification de l’animal en tant que bien se porte donc sur une potentielle utilité pratique de cette qualification. Il semble que la qualification de bien ne fasse pas obstacle à sa protection, ou du moins que la création d’une personnalité juridique de l’animal ne soit pas nécessairement pratique. Mais l’utilité de cette réforme se doit d’être questionnée car elle crée une ambiguïté juridique, plaçant l’animal entre la chose et la personne. Cette problématique semble ne pas à mettre de côté car la qualification plus exacte de l’animal pourrait avoir des effets considérables sur la pratique juridique, avec des conséquences à ne pas négliger, tant pour l’animal, que pour ceux qui en sont propriétaire. Ce faisant il convient de mettre en exergue une problématique davantage neutre sur le statut de l’animal : la soumission de l’animal au régime des biens détient-elle une pertinence juridique ? Il conviendra donc d’analyser que l’animal détient une qualification de bien au caractère particulier (I) ; et qu’un refus de la création d’un statut juridique autonome de l’animal s’est imposé (II). I – Une qualification particulière de l’animal en droit des biens Depuis 1804, l’animal est considéré comme soumis au régime des biens en droit civil. Pourtant, la doctrine et les milieux associatifs ont pu se montrer très virulents à l’encontre de cette qualification. Cependant, même après la réforme de la qualification de l’animal de 2015, celui reste encore aujourd’hui soumis au régime des biens (A) ; mais ce renouveau va venir appuyer le caractère spécial de ce bien, lui conférant une certaine protection juridique (B). A) Un statut juridique appartenant au régime des biens Que ce soit avec la promulgation du Code civil ou après la réforme de 2015 qui fait de l’animal un être sensible et qui le distingue des biens à cet égard, l’animal reste encore soumis au régime des biens. Que l’on évoque la notion de bien ou de chose, le Code civil ne définit pas ce qu’est un bien. Du moins, l’article 528 du Code civil défini la notion de meubles comme ceux qui « peuvent se transporter d’un lieu à un autre ». Cependant, rien n’est dit sur la définition intrinsèque du bien. Ce faisant la liste des biens se trouve être la catégorie mère d’une myriade d’objets de droit. Par voie de conséquence, l’article 529 du Code civil dispose que les créances doivent être considérée comme des meubles par leur détermination. Intuitivement, il semble donc étrange de ranger les animaux au même titre que la qualification qui est faite du meuble par nature et par des créances qui sont conceptuellement très éloignés de l’animal en tant que tel. L’ancien article 528 du Code civil, lui, ne laissait aucune ambiguïté sur la qualification de l’animal, bien que cela puisse largement faire débat. En effet celui-ci disposait que « Sont meubles par leur nature, les corps qui peuvent se transporter d'un lieu à un autre, soit qu'ils se meuvent par eux-mêmes, comme les animaux, soit qu'ils ne puissent changer de place que par l'effet d'une force étrangère, comme les choses inanimées. ». Aujourd’hui les choses sont différentes pour l’animal en droit. L’article 515-14 du Code civil dispose que « Les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité. Sous réserve des lois qui les protègent, les animaux sont soumis au régime des biens ». Si la qualification « d’êtres vivants dotés de sensibilité » laisse à penser qu’il y a une émancipation de l’animal en droit, cet article confirme bel été bien qu’ils appartiennent toujours à la qualification de biens. De surcroit, m’article 524 du Code civil viendra même préciser que dans certains cas les animaux pourront être considérés comme des meubles : « Les objets que le propriétaire d'un fonds y a placés pour le service et l'exploitation de ce fonds sont immeubles par destination. Les animaux que le propriétaire d'un fonds y a placés aux mêmes fins sont soumis au régime des immeubles par destination. ». Ce faisant, il y a une franche dualité au sein même de l’article 515-14 du Code civil qui place face à face la qualification d’être vivant doté de sensibilité avec les biens. Cependant, il serait inconvenable de nier les rapports civils que l’être humain avec les animaux. A y regarder de plus près, l’être humain dispose de l’usus et de l’abusus sur l’animal, on dit en terme général que l’on est propriétaire de son animal. Ainsi dans le cadre des courses hippiques, le propriétaire utilise son cheval et en retire des bénéfices. Néanmoins, ce statut de bien n’est pas aussi barbare que certains voudraient le laisser penser. D’autres dispositions qui protègent l’animal en font de lui un bien particulier (B). B) Une protection juridique de l’animal en tant que bien Si l’animal est considéré comme un bien, il n’en demeure pas moins que celui reste protégé et se distingue à part entière comme une catégorie de bien particulier. Premièrement, le Code civil opère cette distinction particulière de l’animal dans l’article 515-14 du Code civil, qui fait de l’animal un être vivant doté de sensibilité, et qui le différencie ainsi des biens tout en précisant qu’il fait partie de ceux-ci. Cette disposition qui semble contradictoire en son sein, révèle davantage une distinction qui permet une différente appréciation de ce bien aux caractères particuliers. Ce faisant, si l’animal est considéré comme un bien en droit civil, il ne sera pas considéré comme tel en son intégralité. Par ailleurs, en accord avec ce carat ère particulier, l’animal ne se compose pas de tous les éléments de la propriété comme dans le cas d’un bien plus classique. En effet, la tripartie de l’usus, du fructus et de l’abusus se trouve amputée de son dernier élément. L’article 544 du Code civil énonce implicitement ces trois composants du droit de propriété. Ainsi l’abusus permet de disposer entièrement de son bien, et ainsi la vendre, ou mettre en place la destruction totale ou partielle de son bien. Ce faisant, s’il est possible de vendre l’animal en tant que propriétaire, il n’est guère envisageable de le détruire au sens d’une bien. C’est pour cette même raison que le législateur a encadré les limites de l’abusus par des dispositions antérieures à la réforme de 2015. C’est donc par la Loi du 10 juillet 1976 n°76-629, que le législateur a premièrement entendu distinguer l’animal bien mobilier, de l’animal être sensible en disposant que « Tout animal étant un être sensible doit être placé par son propriétaire dans des conditions compatibles avec les impératifs biologiques de son espèce. ». Cette disposition sera par ailleurs reprise par l’article L. 214-1 du Code rural et de la pêche uploads/S4/ dissertation-seance-n01.pdf

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  • Publié le Mar 08, 2021
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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