Séance 7 – Le Conseil Constitutionnel Le Conseil constitutionnel est une des cr
Séance 7 – Le Conseil Constitutionnel Le Conseil constitutionnel est une des créations les plus originales de la Constitution du 4 octobre 1958. Le contrôle de constitutionnalité a longtemps été ignoré ou refusé en France, du fait de la tradition de la souveraineté de la loi. En effet, pendant longtemps, le syllogisme suivant a prévalu : le peuple est souverain, le Parlement représente le peuple, le Parlement est souverain. Ainsi, sous la IIIe République, le Parlement étant le seul représentant de la volonté générale. Comme le relève à juste titre le constitutionnaliste Guy Carcassonne, c’était oublier que la démocratie ne se résume pas à la souveraineté, qu’elle soit populaire ou nationale, mais suppose que l’exercice de cette souveraineté se fasse dans le cadre d’un État de droit, c’est-à-dire dans la soumission de tous, à commencer par l’État lui-même et ses organes, au droit établi et modifiés selon des formes déterminées. C’était également oublier que la Constitution est la première des manifestations de la souveraineté et que nul ne doit pouvoir excéder les attributions qu’elle confie. La Constitution de la IVe République a fait sienne ses évidences en mettant en place un organe, le Comité constitutionnel, chargé de contrôler la constitutionnalité des lois. Cependant, elle ne lui a pas donné les moyens d’assurer pleinement son rôle. D’une part, il ne pouvait être saisi que sur demande conjointe du président de la République et du président du Conseil de la République (ancêtre du Sénat) et à la suite d’une demande de la majorité absolue des membres de ce Conseil. D’autre part, il exerçait un contrôle de constitutionnalité de la loi uniquement par rapport aux titres I à X de la Constitution (art. 92) et non au regard du Préambule de celle-ci. Enfin, s’il donnait un avis favorable, la loi ne pouvait être promulguée qu’après modification de la Constitution (art. 91 et 93). Autrement dit, en cas de conflit entre les deux normes, il fallait réviser non pas la loi, mais la Constitution. De fait, le Comité constitutionnel n’a pas fonctionné : il n’est intervenu qu’une seule fois en 1948. La Constitution de la Ve République a tiré les leçons de cet échec en instaurant un véritable contrôle de constitutionnalité des lois et en le confiant à un organe spécialisé, le Conseil constitutionnel. Toutefois, le développement de ce contrôle a tenu davantage à la jurisprudence du Conseil qu’à la volonté des rédacteurs du texte initial de la Constitution. En effet, le Conseil est réputé comme ayant d’abord été chargé d’être « le chien de garde de l’exécutif » selon les termes de Michel Debré. Sa mission consistait à protéger le Gouvernement des incursions du Parlement dans le domaine réglementaire. Par la suite, le Conseil constitutionnel est devenu le gardien des droits et libertés à partir de sa célèbre décision Liberté d’association du 16 juillet 1971. La révision constitutionnelle de 1974, élargissant la saisine du Conseil constitutionnel à 60 députés et 60 sénateurs, et celle de 2008, instaurant la question prioritaire de constitutionnalité, ont parachevé cette évolution et consacré la place devenue éminente du Conseil. Si le Conseil constitutionnel est davantage connu en sa qualité de juge constitutionnel, il exerce d’autres fonctions – notamment des fonctions consultatives – qui expliquent peut-être le refus du constituant de 2008 de le qualifier de Cour constitutionnelle. Sa composition (I) et ses attributions (II) seront successivement évoquées. I. La composition du Conseil constitutionnel A-Les membres nommés et les membres de droit L’article 56 de la Constitution opère une distinction entre les membres désignés (1), les membres de droit (2) et le président du Conseil constitutionnel (3). (1) À l’exception des membres de droit, les membres du Conseil constitutionnel sont nommés par des autorités politiques : trois par le président de la République, trois par le président du Sénat et trois par le président de l’Assemblée nationale. Ils sont nommés pour neuf ans, avec un renouvellement par tiers tous les trois ans, ce qui est un gage de stabilité et de continuité. Par conséquent, sauf décès ou démission, chaque autorité nomme un nouveau membre tous les trois ans. Pour être membre du Conseil constitutionnel, il faut être majeur, jouir de ses droits civils et politiques et avoir la nationalité française. Ce faisant, contrairement aux membres d’autres juridictions constitutionnelles, aucune condition de compétence juridique n’est exigée de la part des membres du Conseil constitutionnel. La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a apporté une modification à la procédure de nomination. Désormais, l’article 56 de la Constitution prévoit que, pour les membres nommés par le Président de la République, la procédure prévue à l’article 13 est applicable. De fait, d’une part, les nominations souhaitées par le Président de la République sont soumises à l’avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée – en l’occurrence la commission des lois. D’autre part, le Président de la République ne peut procéder aux nominations envisagées lorsque l’addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. Quant à la nomination des autres membres par les présidents de chaque assemblée, elle n’est soumise qu’au seul avis de la commission permanente compétente de l’assemblée concernée. (2) Sont membres de droit et à vie du Conseil constitutionnel les anciens présidents de la République. Entre autres raisons, il s’agissait d’assurer aux anciens présidents une retraite assez confortable et de remercier ceux de la IVe République d’avoir facilité l’accès au pouvoir du Général de Gaulle en 1958. Toutes les tentatives de suppression de cette catégorie de membre ont échoué . (3) Le président du Conseil constitutionnel est nommé par le président de la République. Le titre de président n’est pas purement honorifique dans la mesure où plusieurs prérogatives lui sont attachées : il a voix prépondérante en cas de partage , arrête l’ordre du jour et désigne le rapporteur sur chaque affaire. B- Le statut des membres du Conseil Avant leur entrée en fonction, les membres du Conseil constitutionnel prêtent serment devant le Président de la République de respecter la Constitution. Attention : Toutefois, les anciens présidents de la République ont été dispensés de cette obligation, jugée humiliante au regard de leurs anciennes fonctions. Leur statut vise à garantir leur indépendance. Tout d’abord, ils sont irrévocables. Ensuite, leur mandat n’est pas renouvelable, sauf si le titulaire de celui-ci a remplacé un membre du Conseil démissionnaire ou décédé dans les trois dernières années du mandat restant à accomplir. En outre, ils sont soumis à un régime d’incompatibilité rigoureux : ils ne peuvent être membres du Gouvernement, du Parlement, du Parlement européen, du Conseil économique, social et environnemental ni être Défenseurs des droits. De plus, ils ne peuvent détenir un mandat électoral et exercer toute fonction publique non élective ou toute autre activité professionnelle ou privée . Les conséquences du non-respect des règles d’incompatibilité diffèrent selon leur auteur. S’agissant des membres désignés, il entraîne leur démission d’office. Quant aux membres de droit, il fait obstacle à ce qu’ils siègent au Conseil aussi longtemps qu’ils exercent les fonctions incompatibles et il n’y a naturellement pas lieu à leur remplacement (Cons.Constit. n° 94-354 DC du 11 janvier 1995, loi relative à la déclaration de patrimoine des membres du Parlement et aux incompatibilités applicables aux membres du Parlement et à ceux du Conseil constitutionnel). Enfin, ils sont soumis à une obligation de réserve les contraignant à garder le secret des délibérations, à ne pas donner de consultations et à ne pas exprimer de position politique sur des sujets ayant fait ou pouvant faire l’objet d’une décision du Conseil. II. Les attributions du Conseil constitutionnel Le Conseil constitutionnel a toujours refusé de se considérer comme une autorité ayant compétence pour régler tous les problèmes d’ordre constitutionnel en France. En effet, il estime qu’il ne dispose pas d’une compétence générale, mais d’une compétence délimitée par les textes (Cons. Constit. n° 62-20 DC du 6 novembre 1962 ; Cons. Constit. n° 92-313 DC du 23 septembre 1992). Ces textes sont la Constitution et l’ordonnance portant loi organique du 7 novembre 1958. Le Conseil constitutionnel possède plusieurs types d’attributions, qui sont prévus dans différents titres de la Constitution et pas seulement dans le titre 7 qui lui est consacré. La nature de ces attributions est variée. Il peut intervenir en tant qu’autorité constitutionnelle, dans un processus situé en dehors de tout contentieux. Les décisions ou avis qu’il prend ne sont alors pas des actes juridictionnels. (A) Il peut également intervenir en tant que juge électoral pour les élections à caractère national. Attention : Concernant les élections européennes dont le contentieux est confié au Conseil d’État. (B) Enfin, il peut intervenir en tant que juge constitutionnel – c’est son rôle le plus important, notamment en matière de protection des droits et libertés. (C) A- Le Conseil constitutionnel, autorité constitutionnelle En tant qu’autorité constitutionnelle, le Conseil constitutionnel intervient dans trois hypothèses : deux intéressent le président de la République, une intéresse les candidats à l’élection présidentielle. D’une part, saisi par le Gouvernement, le Conseil constitutionnel peut constater l’empêchement définitif uploads/S4/ cours-optimise-jurislogic-7.pdf
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- Publié le Aoû 13, 2021
- Catégorie Law / Droit
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