Droit du travail sénégalais : Diplôme Supérieur Comptable, année 2007 – 2008 Pa
Droit du travail sénégalais : Diplôme Supérieur Comptable, année 2007 – 2008 Par M. Y. Bodian, FSJP/UCAD Cours de droit du travail INTRODUCTION Le souci de réguler les rapports de travail dépendant afin d’éviter des explosions sociales qui bouleverseraient gravement l’ordre public et perturberaient la croissance économique est à l’origine du droit du travail. En effet, la situation de totale dépendance dans laquelle se trouvaient les travailleurs au lendemain de la révolution industrielle avait choqué une partie de l’opinion publique et engendré de violents conflits sociaux. Les grévistes en France étaient alors comparés à des « bandits », des « apaches1 ». Le droit du travail moderne est ainsi issu de la crise de 1929. Il peut être défini comme étant l'ensemble des règles législatives, réglementaires et conventionnelles régissant les rapports individuels ou collectifs de travail dépendant. Cette définition met en exergue la spécificité de la matière qui se distingue des autres disciplines juridiques par ses caractères, son objet et ses sources. 1- LES CARACTERES ET L’OBJET DU DROIT DU TRAVAIL Le droit du travail à organise les rapports sociaux au sein de l’entreprise. Son objet est le travail dépendant. C’est en cela que ce droit prend parti en faveur du salarié. Il est donc à la fois un droit partisan, progressiste et autonome. Un droit partisan : Le droit du travail est un droit partisan en ce sens qu’il est élaboré essentiellement à destination du salarié. Le droit du travail est, pour l'essentiel, un droit de protection du salarié en raison de son état de subordination. Cette protection consiste à assurer au salarié une sécurité de l'emploi et des conditions de travail ainsi qu’une participation à l'élaboration et à l'application du droit du travail. Le droit du travail est un droit d’inégalité, non de réciprocité. Le caractère impératif de ses règles exige d’ailleurs souvent l’édiction de sanctions pénales ayant donné naissance à un véritable droit pénal du travail. Mais aujourd'hui, le droit du travail s'oriente également vers la protection de l'entreprise. Beaucoup de ses règles assurent la performance, la croissance, la 1 « Les grévistes, ces Apaches sans foi ni loi », Le temps (18 novembre 1908), cité par Jean – Emmanuel RAY, Mutation économique et droit du travail, Revue Droit social 1986, p.11. Page 1 sur 48 Droit du travail sénégalais : Diplôme Supérieur Comptable, année 2007 – 2008 Par M. Y. Bodian, FSJP/UCAD compétitivité de l'entreprise en allégeant ou en assouplissant ses charges grâce à la notion de flexibilité. Le caractère partisan du droit du travail est aujourd’hui remis en cause par sa « flexibilité » croissante, c’est à dire une souplesse accrue au profit de l’employeur, signe d’une ambivalence de ce droit, désormais apte à prendre aussi en compte les intérêts de l’entreprise. Elle rappelle aussi que cette discipline, marquée par les conflits d’intérêts, est la résultante de rapports de force dont le point d’équilibre est par nature mouvant. Ce qui confère au droit du travail un caractère évolutif, dynamique, (contingent ou changeant). Il est instable car il organise la vie quotidienne des travailleurs et est influencé par la situation économique, politique, sociale, qui est instable par nature. Il se transforme et progresse sous l'impulsion des facteurs techniques, économiques et sociaux. Il est un instrument de paix sociale car il influence le mode de vie du salarié (salaire, durée du travail, âge de la retraite. Le droit du travail est un droit de progrès social en ce sens qu’il admet qu’une norme inférieure déroge à une norme supérieure, lorsqu’elle est plus favorable aux salariés que celle-ci. Ce qui permet notamment aux conventions collectives d’améliorer le statut légal. C’est ce que l’on appelle le principe de faveur. Ce principe commande, en cas de conflits de normes, d’appliquer non pas la norme hiérarchiquement plus élevée, conformément à la hiérarchie des normes, mais celle qui est plus avantageuse pour le salarié. Cette possibilité de dérogation « in favorem » est caractéristique de l’ordre public social. Elle a été érigée par la jurisprudence en principe général du droit, mais n’a pas de valeur constitutionnelle. Elle connaît aujourd’hui une double limite. D’une part, certaines règles ne sont susceptibles d’aucune dérogation, parce qu’elles sont le reflet, non de l’ordre public social, mais de l’ordre public fondamental, à indérogabilité absolue (libre entreprise, propriété privée, responsabilité, prohibition des engagements perpétuels). D’autre part, certains accords collectifs, dits accords dérogatoires, peuvent aujourd’hui, dans des domaines limitativement énumérés par la loi (aménagement du temps de travail, par exemple), déroger « in pejus » à celle-ci, c’est à dire au détriment des salariés. La loi devient dans ce cas supplétive. C’est ce que l’on appelle l’ordre public dérogatoire, Page 2 sur 48 Droit du travail sénégalais : Diplôme Supérieur Comptable, année 2007 – 2008 Par M. Y. Bodian, FSJP/UCAD supplétif ou subsidiaire. On peut déroger à la loi, mais seulement par convention ou accord collectif. Le droit du travail protége alors le salarié sans faire abstraction de l’entreprise. Il protége l’ensemble des intervenants pour une relation d’équilibre. Le droit du travail est aussi un droit, jeune et diversifié. Le droit du travail est relativement récent. En France, son apparition en tant que législation remonte à la fin du XIX siècle et l’expression « droit du travail » est employée depuis une quarantaine d’année environ. Jusqu’en 1950, on connaissait la législation industrielle et le droit ouvrier. Au Sénégal, l’apparition du droit du travail remonte à l’introduction du code du travail d’outre mer de 1952. Enfin, c’est un droit diversifié. La population salariée s’est accrue depuis le XIX siècle, et les dispositions du code du travail ont été étendues à des personnes qui avaient un statut imprécis (les journalistes par exemple) et à des activités nouvelles (télé services). Le droit du travail, bien que bénéficiant de l'apport des disciplines juridiques telles que le droit des obligations, le droit administratif et le droit pénal, est aussi un droit autonome. Il a ses propres concepts et surtout ses propres sources. 2- LES SOURCES DU DROIT DU TRAVAIL : Les sources du droit du travail sont à la fois internes, communautaires et internationales. Les sources internationales du droit du travail forment un véritable droit international du travail constitué par les traités internationaux, les instruments des droits de l’homme et les conventions internationales. Les traités internationaux sont des accords conclus entre deux ou plusieurs Etats souverains (c’est à dire bilatéraux ou multilatéraux) et fixant des règles obligatoires sur un objet déterminé. Ils tendent à organiser et à faciliter les relations économiques et sociales entre les Etats membres. Mais d’autres traités ont pour but de tendre vers une unification des législations entre les parties signataires. Ils forment ce que l’on appelle le droit communautaire originaire. Les instruments des Droits de l’homme constituent également une source importante du droit du travail. Ils contiennent des droits fondamentaux applicables à tous les Page 3 sur 48 Droit du travail sénégalais : Diplôme Supérieur Comptable, année 2007 – 2008 Par M. Y. Bodian, FSJP/UCAD travailleurs tels que le droit à un recours effectif devant les juridictions nationales, le principe de l’égalité et de non discrimination, le droit au travail, la liberté d’organisation et de négociation collective. Les conventions internationales sont des accords conclus sous les auspices ou dans le cadre des organisations internationales et applicables dans l'ordre juridique interne des Etats qui les ont ratifiées et publiées, une fois entrées en vigueur (nombre de ratifications). Les conventions internationales de travail, sont principalement élaborées au sein de l’OIT par la conférence internationale du travail. Cet organisme tripartite, composé de représentants des Etats membres, des salariés et des employeurs et créé en 1919, est doté d’un secrétariat permanent (Bureau international du travail). Il élabore des recommandations, facultatives, et des conventions, obligatoires pour les Etats qui les ratifient. L’application des conventions par les Etats donne lieu à des contrôles par des comités d’experts, notamment à la suite de réclamations déposées par les intéressés. Les sources communautaires dérivées du droit du travail sont des règles élaborées par un organe communautaire (conseil des ministres par exemple) et applicables dans tous les Etats membres de la communauté. Elles sont principalement constituées des directives et des règlements. Au niveau national les sources du droit du travail se composent de sources étatiques et de sources non étatiques. Les principales sources étatiques du droit du travail sont la constitution, les lois et règlements et la jurisprudence. La constitution est la norme (texte) juridique fondamentale élaborée par le pouvoir constituant et destinée à organiser les institutions politiques ou pouvoirs de l'Etat et à garantir les droits des citoyens et les libertés fondamentales. L'actuelle constitution du Sénégal instituée par la loi référendaire n° 2001-03 du 22 Janvier 2001 proclame ou reconnaît notamment dans son préambule et ses articles 8 et 25 un certain nombre de droits sociaux fondamentaux et de principes particulièrement nécessaires à notre temps comme le droit au travail, le droit de grève, le droit syndical, la liberté de travailler, le droit de participer à la détermination des conditions de travail, le principe fondamental de non discrimination, le uploads/S4/ cours-droit-du-travail-yaya-bodian.pdf
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- Publié le Mar 17, 2022
- Catégorie Law / Droit
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