B. Durand, Droit musulman. Droit successoral In: Revue internationale de droit
B. Durand, Droit musulman. Droit successoral In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 44 N°3, Juillet-septembre 1992. pp. 730-732. Citer ce document / Cite this document : B. Durand, Droit musulman. Droit successoral. In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 44 N°3, Juillet-septembre 1992. pp. 730-732. http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_1992_num_44_3_4556 730 REVUE INTERNATIONALE DE DROIT COMPARÉ 3-1992 vers le droit communautaire et la Convention européenne des droits de l'homme. Au-delà du constat et du débat, le livre est donc ouvert vers l'avenir. Comme on l'a justement dit, la Cour de Strasbourg tente de faire de la démocratie un concept juridique et cette démocratie est le seul lieu où puisse être exercée la liberté garantissant à la fois le respect des valeurs nationales et la possibilité de recourir à des instances supranationales chargées de la protection juridique des droits. La Convention européenne des droits de l'homme et la jurisprudence européenne ont déjà bouleversé les systèmes nationaux de procé dure pénale si bien que, malgré bien des résistances qualifiées d'héritages culturels, l'émergence d'une conscience européenne est bien là et le rapprochement des procédures est parfaitement possible sur la base d'une convention qui n'est pour tant pas conçue comme un texte de procédure pénale. Comme l'a fort bien dit Mireille Delmas-Marty la recherche d'une identité commune sans uniformité pourrait bien être pour les juristes « la voie de la sagesse ». Les profondes réflexions que l'on trouvera dans ce livre animeront sans aucun doute dans l'avenir d'autres débats. Cet ouvrage restera dans tous les cas la base indispensable sur laquelle il sera possible d'échafauder bien d'autres construction. Pierre COUVRAT Bernard DURAND. — Droit musulman. Droit successoral, Paris, Litec, 1991, 432 pages. Les spécialistes français du droit musulman sont si rares, qu'en leur sein on ne peut accueillir qu'avec le plus grand plaisir un nouveau venu, surtout lorsqu'il est de grande qualité. M. Bernard Durand figure au nombre des plus remarquables étudiants que j'ai rencontrés au cours de ma longue carrière universitaire. Reçu, brillamment, au concours d'agrégation d'Histoire du droit et de Droit romain, en 1970, il part très vite pour le Sénégal, où, pendant de longues années, il enseigne à la Faculté des sciences juridiques et économiques de l'Université de Dakar, l'Histoire des institutions et le Droit musulman. A telle enseigne que, dans sa préface à l'ouvrage ici présenté, M. Seydou Madani Sy, recteur honoraire de cette Université, n'hésite pas à affirmer que, « d'une certaine manière, c'est grâce à des hommes comme lui que l'enseignement de l'Histoire des institutions et du Droit musulman a pu se maintenir à Dakar ». Fruit de ces enseignements, le manuel de M. Bernard Durand tient beaucoup plus que les promesses de son titre (ce qui ne contribue pas peu à son intérêt et à son originalité) le tout, à deux niveaux. 1. — Des esprits chagrins s'étonnent peut-être de la longueur des développe ments que, dans son titre II sur « La vocation successorale », l'auteur réserve à la parenté et surtout au mariage. Au vrai, ce choix peut être expliqué — et justifié — par la conjugaison de deux circonstances : avant tout M. B. Durand s'adresse aux étudiants africains — spécialement sénégalais — comme à tous ceux qui voudraient s'initier aux arcanes de l'Islam et de son droit ; mais, dans le même temps, c'est d'emblée les successions qu'il décide de leur présenter ce qui le conduit, en toute logique, à les situer dans un plus vaste contexte, notamment familial. Dans son introduction il observe, à fort bon escient, « que l'examen du droit des successions, à cheval sur la famille et le patrimoine, rend nécessaire l'examen de notions qui en facilitent la compréhension. Il impose que soient connus des mécanismes relatifs à la parenté ou au mariage qui fondent la vocation héréditaire, permet même de s'égarer sur des sentiers peu fréquentés, soit que certaines institutions disparues tentent le fanatique de l'école buissonnière, soit que la découverte de l'esprit de ce droit rende nécessaires quelques rappels historiques ». D'où, aussi, un très substantiel chapitre préliminaire où, sous le BIBLIOGRAPHIE 731 chapeau de « La formation du droit successoral musulman », sont en fait exposés successivement, la théorie des sources du droit, le phénomène historique du tarissement de l'effort doctrinal de création de normes (ijtihad) et l'ère du confor misme (taglid) qu'il a ouverte, le plus grand juriste étant désormais (pour repren dre la formule d'un islamisan français) non pas le plus profond penseur, mais bien celui qui connaît le mieux l'œuvre des grands devanciers à laquelle il ne peut rien changer. Il y a là, un exemple de riches développements qui n'aurait assurément pas trouvé place dans ce livre si ce dernier s'était inscrit dans un plus vaste projet, celui d'exposer la totalité du droit musulman positif, car il eut alors été précédé d'au moins un tome relatif à l'introduction à l'Islam et à son droit, puis au droit de la famille et des personnes. 2. — De tout ce qui vient d'être dit, convient-il d'inférer que l'ouvrage de M. B. Durand est de nature à n'intéresser que ceux qui, étudiants ou non, vou draient s'initier au droit musulman s'en faut. C'est qu'en réalité nous sommes en présence d'un « droit musulman des successions comparé ». Voici pourquoi. Pendant les premiers siècles de l'Islam, les savants musulmans, par un remarquable travail d'interprétation des données scripturaires (Coran et Tradition du Prophète) ont édifié le Droit musulman. Sans jamais cependant avoir été investis, pour ce faire, d'une quelconque mission officielle. Aussi, a-t-il fallu qu'ensuite leur œuvre réussisse à s'imposer à la pratique administrative et judiciaire. Or, elle n'y est parvenue que partiellement. En tout cas — contrairement à ce qu'ont prétendu des islamisans, à la vérité très minoritaires — il existe bel et bien un Droit musulman positif, lequel, en gros, embrasse le statut personnel et familial, donc, en particulier, les successions. Mais, en raison du phénomène historique que j'ai ci-dessus signalé, lequel a conduit progressivement à l'extinction du pouvoir des juristes-théologiens de dire le droit, ce droit musulman positif s'est figé et est demeuré dans cet état de complet repos jusqu'à l'époque moderne. C'est le XXe siècle qui ouvre l'ère des réformes, ou des tentatives de réforme car les efforts de modernisation des détenteurs du pouvoir se heurtent à l'ordinaire à l'opposition des milieux traditionnalistes, farouchement attachés à la doctrine du conformisme. Sans suivre l'exemple de Kémal Atatürk, qui n'hésita pas à faire table rase du Droit musulman, nombre de législateurs ont entrepris des réformes, plus ou moins hardies, à la faveur le plus souvent de codifications du statut personnel et familial. On comprend dès lors, que l'historien que M. B. Durand est, ne pouvait se borner à l'exposé du droit successoral tel qu'on le trouve décrit dans les ouvrages de l'époque classique. Son ambition toute naturelle a été de rechercher dans quelle mesure il a pu évoluer, tant de l'extérieur sous l'influence principale de l'Europe, que de l'intérieur par utilisation de procédés plus ou moins conformes à l'orthodoxie, voire d'un néo-ijdihad. Faute, toutefois, de pouvoir embrasser l'ensemble du vaste monde islamique, il a fait porter son choix sur les régions qui, par la géographie comme par l'histoire, sont les plus proches des français, à savoir les pays du Maghreb et les pays d'Afrique noire, essentiellement — et pour cause — le Sénégal. Ce qui vaut au lecteur, tout au long de l'ouvrage, une riche confrontation — du triple point de vue social, religieux et politique — du droit des successions classiques, saisi à travers les quatre écoles qui se partagent le monde musulman orthodoxe (ce qui d'ailleurs est un autre aspect du travail comparatif), avec le droit moderne de l'Algérie, de la Tunisie, du Maroc et du Sénégal, l'auteur n'hésitant pas d'ailleurs, pour son plaisir — et le nôtre — à butiner à l'occasion la législation d'autres pays tels que l'Egypte, le Nigeria, la Gold Coast, la Gambie... Est-ce pour atténuer la gravité inhérente à l'exposé des règles juridiques qui dans tout pays gouvernent les conséquences du trépas d'un être humain ? Toujours est-il que M. B. Durand par-ci, par-là, pimente sa description d'une pointe d'hu mour. Comment résister au plaisir de reproduire, à titre d'exemple, le délicieux 732 REVUE INTERNATIONALE DE DROIT COMPARE 3-1992 passage que voici, où son esprit s'associe d'ailleurs à celui d'un autre islamisant : « On peut aussi tenir pour négligeable, mais amusant, le point de savoir si un individu changé en pierre ou en animal laisse ou non une succession quoique les juristes (musulmans) y accordent un intérêt certain. Outre que la question est délicate, largement compliquée par la possibilité de n'avoir été transformée qu'à moitié (et dans quel sens ?) l'hypothèse semble démodée aux esprits rationalistes. Bousquet notait finement et lapidairement dans son Manuel : " il n'y a pas de jurisprudence sur la question " ». En une phrase comme en mille, grâces soient rendues à M. Bernard Durand qui, dans cet ouvrage à la fois savant et attrayant, expose le droit successoral musulman sous le triple éclairage de uploads/S4/ b-durand-droit-musulman-droit-successoral-revue.pdf
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- Publié le Jui 22, 2021
- Catégorie Law / Droit
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