DROIT PUBLIC DES AFFAIRES Introduction Compte tenu de l'importance prise par le

DROIT PUBLIC DES AFFAIRES Introduction Compte tenu de l'importance prise par les interventions publiques dans l'économie, il n’est pas inutile d’avoir une connaissance au moins sommaire des règles de droit qui les régissent. C’est l’objet de ce cours. Il s’adresse avant tout à des étudiants préparant leur vie professionnelle future, et vise à leur fournir les matériaux indispensables pour comprendre et résoudre les questions juridiques les plus courantes liées aux principales interventions publiques sur les activités économiques. Dans cette optique, il convient au préalable de préciser rapidement le sens qui sera donné aux termes "activités économiques", "interventions", et "publiques". - 1 - Les activités économiques Aujourd'hui, sous l'influence de l'idéologie libérale ambiante, qui tend à présumer économique toute activité humaine dès lors qu'elle parait susceptible d'être exercée par une personne privée et de procurer un profit, la notion est entendue extensivement. De manière pragmatique, nous considérerons comme économiques les activités généralement reconnues à caractère "marchand", c'est-à-dire se rattachant directement à la production et à l'échange, le plus souvent à titre lucratif, de biens et de services sur un marché. Pratiquement, ce sont donc essentiellement les entreprises, privées ou publiques, qui les assurent. - 2 - Les interventions Compte tenu des interactions complexes existant entre toutes les mesures prises par les pouvoirs publics et le système d'activités économiques, à la limite, toute intervention publique pourrait être considérée au moins indirectement comme économique. Nous prendrons en compte les interventions visant à produire des effets directs sur les activités économiques, en y participant, en en fixant les règles, ou encore en en orientant ou contrôlant le fonctionnement. - 3 - Le caractère public des interventions Dans le domaine des mesures économiques, les personnes publiques s'effacent assez souvent derrière des personnes privées qui les représentent et qu'elles contrôlent plus ou moins étroitement. S'en tenir aux seules activités des personnes publiques serait en réalité négliger une partie essentielle de leur intervention, celle qu'elles assument par personne privée interposée. On considérera donc comme intervention des pouvoirs publics toute action d'une personne publique ou pour le compte d'une personne publique et sous son contrôle. Malgré le climat libéral dans lequel baigne notre système économique, l'éventualité d'une disparition des interventions publiques ne saurait être envisagée. En effet, l'expérience prouve que la liberté totale laissée aux acteurs économiques aboutit souvent à la disparition de la concurrence et à la négation de l'inspiration initiale. Paradoxalement, donc, toute déréglementation sécrète sa propre réglementation. Ce "paradoxe du libéralisme", comme on l'appelle parfois, s'observe également dans l’Union Européenne. Comme les autres Etats membres, la France, qui y est intégrée, est soumise à un régime supranational, certes d'inspiration libérale, mais en réalité dominé par une énorme technostructure interventionniste. Le respect des obligations imposées par les 1 traités, et la mise en oeuvre des politiques communes impliquent de multiples interventions et un contrôle étroit. L'objet du cours n'est donc pas prêt de disparaître, et la matière est même en constant développement, comme en témoigne, notamment, le nombre et le volume des ouvrages qui lui sont consacrés. Dans une première partie, nous recenserons rapidement les principaux types d’intervention, puis dans les deux parties qui suivront, nous analyserons les traits distinctifs de leur régime juridique, en abordant successivement leurs sources (2ème partie) et leur contentieux (3ème partie). PREMIERE PARTIE : Bref inventaire des principaux champs de l’intervention économique. Les personnes publiques peuvent exercer sur les activités économiques des influences multiples, qu'il ne saurait être question de recenser de manière exhaustive. On se bornera donc ici à rappeler sommairement les interventions les plus courantes, dont la mise en oeuvre est à l'origine de ce qu'il est convenu d'appeler le droit public économique. On en distinguera trois grandes catégories, auxquelles correspondront trois chapitres. - La prise en charge d'activités économiques. - L'encadrement des activités. - L'intervention sur les structures assurant ces activités. CHAPITRE I - La prise en charge d'activités économiques De tous temps, les pouvoirs publics, l'Etat en particulier, ont assuré aux administrés un certain nombre de prestations, pour la plupart liées plus ou moins directement a l’exercice de la souveraineté (activités dites régaliennes, justice, police, etc.), mais parfois aussi constituant des activités économiques au sens de notre définition (production d'objets d'art, de tabac, de poudres et explosifs, notamment). Restée longtemps assez marginale, cette dernière catégorie de prestations s'est développée rapidement à partir du début du XXème siècle. Sous la pression des circonstances, les pouvoirs publics seront conduits à prendre en charge des activités économiques en nombre croissant. Ainsi, en 1907 la défaillance de certaines compagnies oblige-t-elle l'Etat à créer son propre réseau de chemins de fer, alors que jusque là l'exploitation des lignes était assurée par le secteur privé. Et surtout, la première guerre mondiale a engendré un important interventionnisme économique. Cette évolution a suscité bien des réserves, dont se font encore l'écho les tenants du désengagement de l'Etat en matière économique, notamment parce que l’on a soutenu que ce type d'action était réservé aux personnes privées, et, donc, interdit aux personnes publiques. En réalité, il n'existe aucune règle de droit susceptible de justifier valablement cette thèse. La référence à la loi des 2 et 17 mars 1791, dite décret d'Allarde, réputée établir la liberté du commerce et de l'industrie n'est guère probante. En effet, la lettre de ce texte affirme la liberté pour toute personne d'exercer tel négoce, telle profession, art ou métier, qu'elle trouvera bon, sans poser d'exclusion quant à ses bénéficiaires. Cette indifférence de principe à l'égard des acteurs économiques, qui peuvent donc être privés ou publics, est d'ailleurs confirmée aujourd'hui par le droit communautaire, qui "ne préjuge en rien du régime de la propriété dans les Etats membres" (art. 295 du Traité de Rome). Compte tenu de la souplesse de la répartition opérée entre secteurs public et privé, il n'est pas étonnant que la jurisprudence, appelée parfois à arbitrer, hésite à se prononcer sur l'existence d'une délimitation immuable. 2 Ainsi, le Conseil Constitutionnel, lui, a décidé que la plupart des activités de prestations peuvent passer sans restriction de l'un à l'autre des deux secteurs, malgré les dispositions de l'al. 9 du préambule de la Constitution de 1946 selon lesquelles "Tout bien, toute entreprise, dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité". En effet, pour lui, "si la nécessité de certains services publics nationaux découle de principes ou de règles de valeur constitutionnelle, la détermination des autres activités qui doivent être érigées en service public national est laissée à l'appréciation du législateur ou de l'autorité réglementaire selon le cas" (décision des 25-26 juin 1986 - privatisations - ). Jusqu'à présent, le Conseil s'est efforcé d'éviter de préciser quelles sont les activités à caractère de service public dont la constitution implique qu'elles deviennent ou qu'elles demeurent propriété publique. Pour l'instant il impose une seule restriction au législateur : l'interdiction de "déléguer à une personne privée l'exercice d'une mission de souveraineté " (décision du 26 juin 2003). En revanche, il semble que pour lui, les activités économiques érigées en services publics, quelle que soit leur valeur symbolique, voire mythique, puissent toutes être transférées au secteur privé. Ainsi, dans la décision précitée des 25-26 juin 1986, il a jugé que si en 1982 le gouvernement socialiste et sa majorité avaient entendu constituer un service public bancaire par nationalisation du crédit, une majorité libérale pourrait remettre en cause l'existence même de ce service public en le transférant à nouveau au secteur privé. De même, le Conseil, dans sa décision du 23 juill. 1996, statuant sur la loi relative à l’entreprise nationale France Télécom, a admis que si celle-ci y voyait confirmer sa qualité de service public national, sa privatisation ultérieure pourrait la lui ôter. La même démarche a été adoptée à propos des services publics du gaz et de l'électricité : invité à censurer, pour remise en cause d'un service public national, la disparition des établissements publics EDF et GDF au profit de sociétés de droit privé, il s'est borné à constater que pour l'instant celles-ci demeuraient à capital majoritairement public, en n'excluant cependant pas leur privatisation par une loi ultérieure (décision du 5 août 2004). S’il ne semblait alors pas poser de condition particulière à cette opération, il a par la suite subordonné sa constitutionnalité à des changements préalables de l’entreprise la privant « des caractères qui en faisaient un service public national » (décision du 30 novembre 2006). Ainsi, a-t-il jugé que Gaz de France pouvait être privatisé au 1er juillet 2007 puisqu'à compter de cette date il perdait son caractère de service public national. * * * Ces solutions engendrent une grande complexité juridique d'exercice de nombre d'activités économiques. Ici, nous nous bornerons à recenser succinctement les principales modalités d'intervention publique sous forme de prestations économiques. On en retiendra deux, selon qu'elles s'exercent ou non en secteur concurrentiel. Section I - Les activités économiques publiques à caractère de monopole Elles sont caractérisées par l'exclusivité dont bénéficie la personne publique, en l'absence de toute concurrence des personnes privées. Le monopole peut uploads/s1/ droit-public-des-affaires-aes.pdf

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  • Publié le Nov 15, 2021
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